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La soumission de Fabrice Fries (AFP) à Facebook et à l’ordre marchand
Article mis en ligne le 22 décembre 2018

Depuis son « élection » à la tête de l’AFP le 10 avril 2018, Fabrice Fries – dont on rappelle qu’il est domicilié en Belgique… – multiplie les prises de position attestant de sa volonté de privatiser la troisième agence mondiale d’information :

recrutement d’une « cost killer » au poste de directrice générale, application d’une « politique de la faillite » incluant des réductions d’effectifs et la menace de la vente du siège historique. Les toutes dernières interventions médiatiques de Fabrice Fries, visant à promouvoir la « participation [de l’AFP] au programme mondial de "fact checking" de Facebook », enfoncent le clou : en autorisant l’arrivée de ce nouveau cheval de Troie de la privatisation dans l’AFP, le PDG déclare ouvertement sa « soumission librement consentie » [1] à l’ordre marchand. (...)

Quelle chance ont les salariés de l’AFP d’avoir un PDG qui « réaffirme », « poursuit », « précise », « souligne », « rappelle » et « estime » ! Et surtout, quelle chance ont les citoyens du monde d’avoir deux bienfaiteurs comme Facebook et le PDG de l’AFP, bienfaiteurs qui usent leurs vies à lutter main dans la main (et sur toute la planète) contre les fake news et pour la vérité ! (...)

Quelle chance, enfin, que cette alliance pour le moins rafraîchissante au moment où Facebook semble être en quête de sérieux et de légitimité… Le jour même de la parution de la brève de l’AFP, on pouvait lire dans Le Monde un texte de Paul Jorion titré « Facebook, vie et mort d’un business plan » ; un texte-antidote aux fariboles hors-sol de Fabrice Fries, car on y trouve des données relatives à l’histoire et aux turpitudes de cette firme (et de son fondateur), avant tout attirée par… (attention, ceci n’est pas une fake-news) l’appât du gain. (...)

Il aura donc fallu attendre que la complicité de Facebook avec des officines manipulant le résultat d’élections éclate au grand jour, en mars 2018, avec l’affaire Cambridge Analytica, pour que le business model hérité d’une blague de potache soit enfin remis en question. Cette compagnie britannique, fondée par Robert Mercer, libertarien militant richissime grâce à son fonds spéculatif Renaissance Technologies, et Steve Bannon, figure de l’extrême droite américaine identitaire, directeur de campagne de Trump en 2016 puis stratège en chef à la Maison Blanche de janvier à août 2017, a exploité les données Facebook de 87 millions d’Américains pour tenter d’influencer les électeurs par des messages ciblés. […] Cambridge Analytica a pesé de la même façon, avec les mêmes méthodes, sur le résultat en faveur du Brexit.

Résumons… Une agence d’information (aux missions d’intérêt général), l’AFP, s’associe avec une multinationale dont le seul objectif est la maximisation de ses profits via la vente (aveugle et contraire à toute notion d’intérêt général) de données personnelles, Facebook, pour faire du… « fact-checking », et se poser en garantes de… la vérité. Voilà qui semble éthique et honnête. Voilà surtout une affaire qui sera à même de satisfaire les intérêts des dirigeants des deux entités (...)

Parfaitement interchangeables, les grands esprits se rencontrent toujours dans le petit monde des dominants… pour le plus grand malheur de l’information, bien partie pour s’appauvrir encore davantage au nom d’une pseudo « quête de la vérité » qui a décidément bon dos.