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Jean-Marie Harribey, pour Alternatives Economiques
La surenchère des manipulations
Article mis en ligne le 21 novembre 2013

J’ai failli brûler mon bonnet rouge de montagne. Mais comme il me tient chaud aux oreilles, je l’ai gardé, mais ça a été moins une. La manière dont les faiseurs de développement insoutenable en Bretagne et ailleurs ont réussi à se faire passer pour victimes en dit long sur la capacité des classes dominantes à asseoir leur hégémonie – au sens qu’avait donné Gransci à ce mot – sur les salariés et petits producteurs condamnés au chômage ou à ne pouvoir joindre les deux bouts. Et on peut allonger la liste des manipulations tous les jours, les exemples abondent. Ainsi de la compétitivité de la France, de l’acceptation de la baisse des dépenses publiques, de la fiscalité…

Encore sur la compétitivité

Les journaux Les Échos et Le Figaro ont publié le même jour (14 novembre 2013) le même graphique ci-dessous mesurant l’évolution du coût unitaire du travail (mesuré par le rapport du salaire horaire et de la productivité du travail) dans la zone euro. L’indice 100 pour chacun des pays représentés (Allemagne, Espagne, France, Italie, Portugal) est en 2000. L’œil se porte immédiatement sur l’Allemagne et la France : la première voit son indice passer à 113 en 2013 et la seconde à 130. La conclusion que l’on veut faire tirer au citoyen : la France a un coût du travail supérieur à l’Allemagne. Pas du tout, et c’est là que se situe la manipulation. (...)


Encore sur les dépenses publiques

Le journal Les Échos, encore lui, a publié (18 novembre 2013) un sondage sur l’opinion des Français sur les mesures d’économies budgétaires. On y apprend toutes les choses que l’idéologie dominante nous dit qu’il faut savoir et accepter à tout prix. Faire travailler les fonctionnaires plus longtemps (66 % d’opinions favorables), geler toutes les prestations sociales (60 %), supprimer des postes de fonctionnaires (56 %), etc.

Quand fera—t-on un sondage en demandant : « savez-vous combien de temps travaillent les fonctionnaires ? », ou bien « voulez-vous qu’on diminue les soins remboursés dans les hôpitaux ? ou encore « voulez-vous qu’on diminue le nombre de professeurs des écoles ? ».
La manipulation consiste à poser une question sans que soient explicites les conséquences d’une réponse ou d’une autre. La manipulation consiste aussi à écarter a priori toute question qui viendrait inverser radicalement les politiques que les commanditaires du sondage veulent faire légitimer par celui-ci. Ainsi, ne figure pas dans ce sondage une question du genre : « êtes-vous favorable à la diminution des niches fiscales accordées aux plus riches ? » ou bien « êtes-vous favorable à la diminution des aides aux entreprises accordées sans contrepartie de leur part ? » (...)