
Le collège d’experts indépendants estime que la plupart des projets d’aménagement et programmes publics examinés en 2021 ne prennent pas en compte l’impact sur le climat ou la biodiversité.
A l’issue d’une année 2021 exceptionnellement chargée pour l’Autorité environnementale (AE), son président, Philippe Ledenvic, tire une conclusion catégorique des 159 avis rendus par l’instance : « La transition écologique n’est pas amorcée en France. » Philippe Ledenvic constate de surcroît « des évolutions préoccupantes pour la démocratie environnementale », et exprime « pour la première fois une inquiétude concernant les moyens » de l’AE, une instance adossée au Conseil général de l’environnement et du développement durable et composée d’un collège d’experts, qui a rendu public son rapport annuel, jeudi 5 mai. (...)
Ceux-ci sont chargés, non pas d’autoriser ou d’interdire les politiques publiques impliquant le ministère de l’écologie et les dossiers importants d’aménagement – infrastructures routières, ferroviaires ou portuaires, nouveaux quartiers, aménagements de sentiers littoraux, etc. –, mais de fournir sur eux, en toute indépendance, des avis argumentés. Or, que ces projets soient privés ou publics, la prise en compte des enjeux liés au déclin de la biodiversité et au réchauffement climatique apparaît très insuffisante. Pourtant, « si on ne l’anticipe pas, les limites planétaires et les effets de leur dépassement s’imposeront de façon implacable », écrit l’AE en introduction. (...)
Les responsables restent, selon l’institution, cantonnés à « des modèles à bout de souffle », qui les conduisent à présenter toujours « les mêmes programmes, les mêmes financements, les mêmes projets » aux conséquences irréversibles. « Nous n’avons pas observé de ralentissement des projets autoroutiers et nous avons examiné deux projets aéroportuaires », relève M. Ledenvic.
Surcroît inhabituel de dossiers
L’Etat a sa part dans ce constat sévère, pour les lacunes dans les politiques qu’il mène, mais aussi pour les reculs récents du droit français de l’environnement « au prétexte de “simplifier” les processus administratifs », dénonce le rapport. (...)
En plus de 91 projets – 30 projets industriels dont 10 dossiers nucléaires, 29 projets d’aménagements urbains et 28 infrastructures de transport –, l’AE a dû se pencher sur 68 plans et programmes publics. Ce surcroît inhabituel de dossiers s’explique par une série de mises en conformité de la législation française avec des directives européennes. Les experts ont eu à analyser des politiques tous azimuts, et non des moindres, comme la stratégie française dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune, le septième plan d’action sur les nitrates – inefficace comme ses prédécesseurs – ou la deuxième mouture du plan Ecophyto, qui échoue, depuis 2008, à réduire l’usage des pesticides agricoles… Ce sont, aux yeux des experts, de « nouvelles occasions manquées pour la France d’accompagner ses agriculteurs dans la transition vers l’agroécologie, pour une agriculture significativement moins polluante et plus résiliente face au changement climatique ». (...)