
Sa matière première : du fœtus de vache vidé de son sang.
La société Hampton Creek, spécialisée dans les aliments à base de végétaux, a récemment annoncé son projet de commercialiser de la viande synthétique d’ici l’année prochaine. Le plan est ambitieux, et les raisons d’en douter nombreuses –le fabricant de mayonnaise végétarienne a souvent été critiqué, que ce soit parce que son dossier scientifique ne tient visiblement pas la route, que ses étiquettes sont trompeuses ou encore parce que certains de ses employés ont été forcés d’acheter des pots en nombre pour faire monter artificiellement ses ventes. Hampton Creek espère venir à bout de ses concurrents d’ici deux ans, malgré une entrée tardive sur le marché de la « viande in vitro » –une cible audacieuse, qui ajoute au scepticisme général.(...)
si le FBS est très pratique, il n’est d’aucune utilité pour réaliser l’objectif principal de la viande in vitro : cesser de tuer des animaux. Pourquoi ne pas tout simplement manger de la viande de vache, plutôt que d’en passer par un processus fastidieux visant à créer des cellules bovines à partir de cellules bovines ? À l’heure actuelle, la viande synthétique n’est pas végétarienne, ce qui signifie qu’elle ne pourra pas être vendue à des végétariens ou des végans, qui pour beaucoup ne consomment pas de viande à cause de la cruauté ou des coûts environnementaux de l’élevage industriel. De la viande in vitro conçue à partir de FBS ne résout en rien ces problèmes –en réalité, pour bien des sensibilités, savoir que votre viande provient d’un animal mort-né qu’on a vidé de son sang pourrait être encore plus perturbant.(...)
Le FBS a servi à développer des vaccins contre de nombreux cancers, la grippe, le VIH et l’hépatite, et a aussi contribué à une meilleure connaissance des tissus cérébraux et musculaires. D’aucuns cherchent cependant à réduire son utilisation dans le développement des vaccins, à la fois pour des raisons éthiques, mais aussi de santé publique.
Les vaccins conçus à partir du FBS pourraient transmettre la maladie de la vache folle, et si le risque est extrêmement faible, avec environ une chance sur 40 millions, l’agence de sécurité du médicament américaine, la FDA, décourage fortement son usage depuis vingt-cinq ans.(...)
« Si vous produisez de la viande à partir d’un sérum infecté, vous pouvez transmettre la maladie aux gens »(...)
Malgré les recommandations de la FDA, FBS est toujours très couramment utilisé parce qu’il est très pratique.(...)
Hampton Creek va essayer de fabriquer de la viande synthétique à partir de substances végétales, sans en passer par le FBS ou d’autres produits humains comme les lysats plaquettaires. Trouveront-ils des clients pour en manger ? Comme le soulignait Daniel Engber il y a quatre ans, si la viande synthétique n’a pas bon goût, elle fera un flop –et comme elle n’aura jamais le goût de la vraie viande, c’est une perte de temps que de vouloir en produire. L’autre obstacle majeur sur la route de la viande in vitro, c’est la psychologie humaine : les gens ont en général du mal avec les trucs conçus en laboratoire. Reste qu’une viande synthétique qui n’a jamais vu de sang de fœtus de vache pourrait compter sur un bon argument de vente.