
La pandémie du Coronavirus a brutalement ramené à la réalité nos modes de vie hors-sol, détachés du territoire et de ses contraintes. Cette série d’articles a pour objectif de réfléchir le territoire du Grand Paris sous l’angle de la "symbiose" avec sa région.
Parmi les enseignements de la crise de la Covid-19, nous pourrions en retenir deux en particulier. D’une part, la prise de conscience que la dégradation des milieux naturels, la destruction des habitats, le dérèglement du climat, l’effondrement des populations animales et la diminution de leurs diversités génétiques augmentent les risques infectieux. La Covid-19 est une zoonose, c’est-à-dire une maladie infectieuse animale transmise à l’être humain. La pandémie a brutalement ramené à la réalité nos modes de vie hors sol, détachés du territoire et de ses contraintes.
D’autre part, cette crise a mis en lumière, pendant le confinement, un ensemble de métiers dévalorisés, mais essentiels pour le fonctionnement de la société. Les éboueur·e·s, caissier·e·s, livreur·e·s, infirmier·e·s, etc. ont des rôles indispensables. La crise a révélé aussi que la production locale, les circuits-courts, l’agriculture de proximité sont particulièrement absents de notre métropole tertiarisée à outrance (88% des emplois sont dans le secteur tertiaire en Île-de-France). (...)
« L’homme ne cherche pas la symbiose avec la nature mais sa conquête... hors nous avons besoin d’une entente entre l’homme et la nature pour survivre », écrit l’architecte paysagiste britannique, Ian McHarg en 1969[1]. Dans son ouvrage Design with Nature, McHarg développe une méthode d’analyse des systèmes naturels et humains prenant en compte la complexité des relations entre l’ensemble des composantes d’un territoire, les conditions, les qualités, les contraintes existantes et leur compatibilité avec les besoins humains. McHarg y introduit la notion de symbiose dans l’urbanisme.
Cette notion, apparue très tard dans l’histoire des sciences, désigne les interactions aux bénéfices réciproques entre des organismes étroitement associés. (...)
Notre objectif dans cette série d’articles à venir est d’observer le territoire du Grand Paris à la manière de Ian McHarg, de collecter un certain nombre d’informations et de données sur le territoire (sa morphologie, ses ressources, sa biodiversité) pour définir ses qualités, ses contraintes et ses fragilités (étalement urbain, pollutions sonore et atmosphérique, risque de crue, îlot de chaleur et insécurité alimentaire). Contrairement à McHarg, il ne s’agit plus de définir des lieux pour minimiser l’impact des extensions urbaines (en 50 ans la métropole s’est déjà largement étendue) mais bien de retrouver de la résilience, du sens, des liens entre la ville et son territoire. Nous verrons aussi que la ville est déjà le lieu du « vivre ensemble » par son organisation sociale, seulement, la structure sociale des métropoles se fragmente, s’individualise. De plus ce « vivre ensemble » n’inclut pas l’environnement, il nous faudra donc introduire la notion d’organisation « géo-sociale » de la ville. (...)