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Laye Traoré, l’apprenti boulanger devenu le visage de la galère des jeunes étrangers en France
Article mis en ligne le 26 janvier 2021

Depuis la régularisation de Laye Traoré, obtenue grâce à la grève de la faim médiatisée de son patron le boulanger Stéphane Ravacley, les pétitions affluent pour que d’autres jeunes étrangers en formation obtiennent un titre de séjour. L’histoire de Laye est emblématique du parcours semé d’embûches auquel font face les mineurs isolés tout juste devenus majeurs en France.

Laye, Mamadou… mais aussi Yaya, Souleymane, Amadou, Sékou et des milliers d’autres vivent peu ou proue la même histoire : une arrivée en France en tant que mineur, une prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE), l’obtention d’une formation professionnelle puis à leur majorité, la délivrance d’une OQTF. Depuis plusieurs jours, les pétitions affluent sur les réseaux sociaux pour permettre à de jeunes apprentis d’obtenir un titre de séjour. (...)

Les boulangers Nejla et Miloud en sont à leur 4e apprenti étranger embauché mineur, et contraint de quitter la boulangerie peu après ses 18 ans à cause d’une OQTF. "On les forme et quand ils sont opérationnels, on nous les enlève", regrette Nejla. "Les Français ne veulent plus faire ce métier à cause de la pénibilité. Seuls les étrangers viennent chez nous, alors on fait quoi ?", s’interroge-t-elle. (...)

"Depuis quelques mois, on assiste à une pluie d’OQTF au jour des 18 ans, alors que légalement ils ont jusqu’à 19 ans moins un jour pour faire leur demande de titre de séjour", explique-t-elle. Mais une circulaire du ministre Gérald Darmanin datée de septembre permet aux préfectures de regarder la situation du jeune dès ses 17 ans et donc de l’expulser avant ses 19 ans. (...)

Pour obtenir un titre de séjour travail, les mineurs isolés étrangers pris en charge par l’ASE après 16 ans doivent remplir plusieurs conditions : être engagé dans une formation qualifiante, ne plus avoir de lien fort et régulier avec le pays d’origine, et justifier de leur identité.

C’est sur ce dernier point que la bât blesse, notamment pour les ressortissants guinéens. Une note du ministère de l’Intérieur de décembre 2017 préconise de "formuler un avis défavorable pour toute analyse d’acte de naissance guinéen" en raison d’une "fraude généralisée" de l’état civil dans le pays. (...)
Or, les documents d’identité de Laye et les autres ont déjà été scrutés par les départements quelques années plus tôt, lors de la reconnaissance de leur minorité, une première étape déjà semée d’embûches. "À chaque passage devant une nouvelle administration, il faut tout reprouver", explique Blandine Quévremont, avocate au barreau de Rouen. "Lors de l’examen de la minorité des jeunes, leurs documents n’ont pas posé de problème mais vraisemblablement à leur majorité, si. Les préfectures remettent régulièrement en cause leur état civil", abonde Violaine Husson.

Résultat : l’État français fabrique des clandestins, selon cette membre de la Cimade, "car on sait très bien qu’ils vont rester en France sans-papiers et qu’ils risquent ensuite d’être exploités", dit-elle.
Une future loi ?

Bien qu’il ait obtenu la régularisation de son apprenti, le boulanger de Besançon, Stéphane Ravacley, veut mettre à profit sa nouvelle notoriété et "continuer le combat". Il a ainsi créé la plateforme Patrons solidaires. "Des gamins comme Laye, il y en a des tonnes. Des patrons qui pleurent leur apprenti, il y en a des centaines. J’ai reçu beaucoup de messages dans ce sens donc on a décidé de créer cette page afin que les patrons déposent leurs doléances. Ces derniers montent ensuite un dossier que je transmets à qui de droit dans les préfectures", détaille Stéphane Ravacley.

Ce "simple boulanger", comme il se présente, veut aller plus loin et appelle à une réforme pour permettre aux étrangers de terminer leur formation, quel que soit leur âge. Il doit rencontrer en février des députés. (...)