
Au Sénat, la mesure a quasiment fait l’unanimité : les élus ont voté mercredi 27 mars la proposition de loi défendue par l’UMP visant à ne plus verser l’argent des allocations familiales aux familles dont l’enfant a fait l’objet d’une mesure de placement. Les aides seraient attribuées au conseil général et les parents n’en percevraient plus que 35 % au maximum. L’allocation de rentrée scolaire serait, elle, versée au service d’aide à l’enfance.
Les socialistes ont voté avec leurs collègues de l’UMP, allant contre l’avis du gouvernement. Pour Dominique Bertinotti, ministre de la famille, c’est un camouflet. Mais cette dernière n’est pas la seule à s’opposer au projet de loi. Plusieurs associations – parmi lesquelles l’Union nationale des associations familiales (UNAF), ATD Quart Monde, les Apprentis Auteuil, le Secours populaire, le Syndicat national des médecins de protection maternelle infantile et l’ANAS (Association nationale des assistants de service social) – ont publié un communiqué contre cette proposition de loi.
(...) La première des raisons qui font qu’un enfant est placé aujourd’hui, c’est la situation socio-économique des parents. Certaines familles ne trouvent pas les moyens d’éduquer correctement leurs enfants, parce qu’elles ne sont pas logées ou sont mal logées, parce que la situation de précarité dans laquelle elles vivent fabrique un taux d’anxiété maximum, qui souvent dégénère sur de la maladie psychiatrique. Quand les conditions de vie de la famille sont extrêmement précaires, les enfants sont considérés par l’administration ou par le juge comme étant "en risque" dans leur environnement familial.
Le principe du placement, c’est de sortir les enfants de leur famille à un moment donné afin de permettre aux parents de sortir la tête de l’eau, de trouver une solution à leurs problèmes d’adultes et ensuite de pouvoir réintégrer leur position de parents. (...)
Aujourd’hui, les juges pour enfants, quand ils ont à décider d’un placement, ont déjà la possibilité de demander à ce que les prestations familiales soient versées pour tout ou partie au conseil général. C’est juste une possibilité offerte, dans les cas d’enfants qui pourraient être en situation de danger dans leur famille à cause du comportement des adultes, que ce soit de la violence intra familiale ou des abus sexuels. Mais ces cas représentent une petite partie, environ 20 % des placements. Dans les autres cas, ce qui est constitutif de la décision de placement, c’est la situation de précarité de la famille. Donc on a des gens qui sont victimes d’une injustice sociale d’une certaine façon, et on leur ajoute une couche en leur retirant les "allocs".
Si la proposition de loi passe, la famille ne conservera au maximum que 35 % des allocations, quelle que soit la raison. On inverse la charge de la preuve, et on part du principe que toute difficulté familiale ou éducative est de la faute des parents. (...)