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Le Sénat vote l’interdiction pénale de lire certains sites Web sans bonne foi
Article mis en ligne le 31 mars 2016

Inquisition moderne ? Le Sénat a adopté mercredi soir une disposition qui obligera les internautes qui consultent des sites avec de la propagande terroriste à prouver leur bonne foi. Sinon, trois ans de prison.

Contre l’avis du gouvernement qui sait l’article probablement inconstitutionnel, le Sénat a adopté jeudi un amendement présenté par le groupe des Républicains dans le cadre de l’examen du projet de loi de réforme pénale, qui vise à condamner la lecture répétée de sites de propagande terroriste. Le même texte avait été précédemment rejeté par l’Assemblée nationale.

Que dit le texte interdisant la visite de sites ?

L’article amendé punit de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende que « le fait de consulter habituellement un service de communication au public en ligne mettant à disposition des messages, images ou représentations soit provoquant directement à la commission d’actes de terrorisme, soit faisant l’apologie de ces actes lorsque, à cette fin, ce service comporte des images ou représentations montrant la commission de tels actes consistant en des atteintes volontaires à la vie est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ».

La seule lecture de la propagande écrite est donc exclue, sauf si elle figure sur un site qui montre aussi des images de décapitations ou d’autres atrocités.

Toutefois même dans ce dernier cas, le dispostif « n’est pas applicable lorsque la consultation est effectuée de bonne foi, ou résulte de l’exercice normal d’une profession ayant pour objet d’informer le public, ou intervient dans le cadre de recherches scientifiques ou est réalisée afin de servir de preuve en justice »

Contrairement à d’autres versions antérieures de la proposition, l’internaute qui n’a pas de volonté terroriste et qui consulte « de bonne foi » pour s’informer est donc épargné par les poursuites, au même titre que les chercheurs ou journalistes. C’est heureux, même si cette « bonne foi » devra être prouvée, ce qui renverse la charge de la preuve. (...)

En vain, le sénateur Pierre-Yves Collombat a tenté de combattre l’amendement. « Comme dirait le Général De Gaulle, vaste programme que de poursuivre l’imbécilité », a-t-il commencé. « C’est inapplicable. J’ai un peu de mal à comprendre. Il faut peut-être un peu se réveiller. Il faut bien lutter contre le terrorisme, mais il faut avoir des moyens qui permettent de lutter, et pas seulement se faire plaisir ». (...)

Le principal est la volonté du législateur : condamner un individu pour ce qu’il lit et non pas pour ce qu’il fait ni même ce qu’il projette, ou lui demander de prouver sa bonne foi. Une forme d’inquisition moderne. L’enfer, comme souvent, est pavé de bonnes intentions.