
Incarcéré depuis 2002, Shaker Aamer, le dernier britannique détenu dans la prison de Cuba, clame son innocence et dénonce les traitements inhumains infligés aux prisonniers. Le gouvernement américain reste muet face à la demande de libération immédiate formulée par le Royaume-Uni.
Shaker Aamer est devenu un symbole de la détention abusive dans la prison militaire de haute sécurité de Guantanamo Bay. Filmé dans sa cellule par les caméras de la chaine américaine CBS qui a réalisé un documentaire de 60 minutes, le détenu a demandé à ce que les autorités ouvrent les portes de la prison pour montrer à quel point les prisonniers sont traités « comme des esclaves ». Transféré à Guantanamo il y a plus de onze ans, c’est la première fois que le quadragénaire s’exprime depuis sa cellule. « On ne peut même pas marcher 50 centimètres sans nos chaines. C’est ça un être humain ? C’est ainsi qu’on traite les animaux », s’est-il indigné. « Dites au monde la vérité… S’il vous plait, nous sommes fatigués. Laissez-nous mourir en paix ou bien révélez la vérité. Ouvrez la prison, laissez les gens venir visiter. Laissez-les entendre ce qui se passe », a-t-il demandé du fond de sa cellule. (...)
selon l’avocat pour les droits de l’homme, Clive Stafford Smith, les allégations de ces documents s’appuient uniquement sur les dires d’un témoin incertain et sur des aveux obtenus sous la torture. Les documents sont par conséquent inexploitables. C’est pourquoi, aucune charge n’a été retenue contre le prisonnier qui n’a jamais fait l’objet d’un procès.
Pour se faire entendre et donner un écho aux difficultés rencontrées par les détenus, Aamer a fait plusieurs grèves de la faim depuis février 2013. Il n’hésite pas à s’exprimer quand il le peut pour défendre ses droits et ceux de ses codétenus, c’est d’ailleurs la raison invoquée par certains pour expliquer pourquoi il est encore gardé en détention.
Le soutien du gouvernement britannique
David Cameron qui soutient son ressortissant, a profité du sommet du G8 en juin dernier pour évoquer le cas Aamer avec son homologue américain. (...)
Selon son avocat, également directeur de l’association Reprieve contre la peine de mort, la libération de Aamer a été approuvée par l’administration de George W. Bush, ainsi que celle de Barack Obama, mais n’a jamais été suivie d’effets. Lorsque CBS lui demande pourquoi son client est encore emprisonné, il répond : « Je pense que c’est une question très intéressante et j’apprécierais qu’il y ait plus de transparence. Je souhaite que quelqu’un me donne une explication, mais personne ne le fait. Personne ne me dit pourquoi ils refusent de le laisser partir. » Clive Stafford Smith souligne l’extrême souffrance des prisonniers et des gardes de Guantanamo avant de rappeler l’engagement du président américain. « Obama doit honorer sa promesse et fermer la prison », a-t-il déclaré avant d’ajouter « Shaker Aamer doit retrouver sa famille au Royaume-Uni, ce que souhaite également David Cameron. »
Rares sont les cameras qui ont pu accéder à cette zone de détention où les droits de l’homme sont quotidiennement bafoués, voire même niés. Le reportage inédit de CBS aidera peut-être à faire avancer l’affaire Shaker Aamer, mais en attendant, il permet surtout de rappeler l’échec d’Obama à fermer le camp de détention, malgré l’ordre de fermeture signé deux jours après son investiture, le 22 janvier 2009.