
De milliers de Colombiens sont descendus dans les rues du pays vendredi 26 juillet pour protester contre la vague d’assassinats ciblant les activistes et les anciens guérilleros démobilisés depuis l’accord de paix de 2016. Plus de 700 personnes ont été tuées dans les régions rurales.
À Bogota, comme partout dans le pays, les manifestants brandissaient à bout de bras les portraits des leaders paysans et autres activistes assassinés. Ici, on parle de leaders sociaux.
« Je suis là comme tout le monde parce que nous ne voulons pas qu’il y ait encore des leaders assassinés, nous voulons la paix et nous ne voulons pas que le gouvernement continue à nier les assassinats », explique une manifestante.
Soutien de dernière minute
À en croire le gouvernement et la droite dure, les narcotrafiquants et le crime organisé seraient les seuls coupables de la violence. Le président Ivan Duque a toutefois au dernier moment décidé de soutenir la manifestation. Un geste qui n’a pas convaincu tout le monde. (...)
La manifestation de vendredi pourrait marquer un tournant, comme l’explique Yann Basset professeur de sciences politiques : « C’est depuis l’accord de paix, une manifestation très importante, dans tout le pays, qui marque une prise de conscience vis-à-vis de ce problème des leaders sociaux qui sont assassinés dans les régions. » Reste à voir si la prise de conscience se traduit en action. (...)
Depuis de nombreux mois, pas une semaine ne passe sans qu’un nouvel assassinat ne soit rapporté par la presse. Une situation qui met en péril l’accord de paix signé avec les FARC en 2016, qui n’a jamais bénéficié du soutien de l’actuel président colombien Ivan Duque. Mais pourquoi les autorités colombiennes laissent la situation se dégrader ?
Pour Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et directeur de l’Observatoire Amérique latine à la fondation Jean Jaurès, le président Ivan Duque est littéralement bloqué par deux parties qui s’opposent, notamment par les États-Unis, qui ont accordé une aide pour la bonne mise en œuvre de l’accord de paix de 2016.
Lui-même a gardé une opposition assez ambiguë pendant sa campagne présidentielle. Il reste ambigu depuis qu’il est en responsabilité de la Colombie. Donc, il est dans une position assez inconfortable. D’une part, il a la pression des Nations unies, de l’autre celle de l’ancien président Alvaro Uribe et des responsables du parti Centre démocratique qui sont opposés à ces accords. Donc il navigue entre les deux, avec qui plus est la pression du nouveau président des États-Unis, Donald Trump, qui à la différence de son prédécesseur n’a que faire des accords de paix et qui exerce des remontrances continues à l’égard de la Colombie pour ce qu’il considère comme une absence de coopération avec les États-Unis dans la lutte contre le trafic des stupéfiants, ce qui pour lui est l’essentiel.
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