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« Les deux dangers qui menacent le plus la planète sont le changement climatique et les armes nucléaires »
La Bombe et nous, documentaire de Xavier-Marie Bonnot, produit par DHR et Jean-Claude Bauduret, novembre 2017, 75’.
Article mis en ligne le 16 novembre 2017

Le débat au sujet de l’arme nucléaire est tabou en France, malgré l’extrême menace qu’elle fait planer sur la planète. Le film « La Bombe et nous » repose la question de la bombe atomique, explique Paul Quilès.

La France est le pays où on ne parle pas de l’arme nucléaire. On débat de tous les aspects de la sécurité des citoyens - sécurité de l’emploi, sécurité sociale, sécurité policière, sécurité face au terrorisme. Mais pas de la sécurité du pays qui, nous dit-on, serait assurée par la dissuasion nucléaire.

La réflexion sur ce sujet est limitée à la convocation rituelle à chaque changement de président de la République d’un comité, composé de représentants des administrations et de quelques experts, pour analyser l’environnement stratégique et les menaces auxquelles est confrontée la France et en déduire les moyens nécessaires à ses armées et à sa politique de sécurité. L’intention est légitime. La plupart des grands pays procèdent ainsi.

Ce qui distingue la France est la démarche consistant à exclure systématiquement de l’analyse toute remise en cause non seulement de la doctrine de dissuasion nucléaire, mais encore de ses « composantes ». (...)

Cette arme ne permet ni de prévenir ni de résoudre les conflits du monde actuel

Évacuer ainsi a priori toute discussion de ce sujet jugé tabou permet d’occulter aisément les paradoxes et contradictions qui caractérisent la réflexion stratégique française.

L’intérêt du film La Bombe et nous est de présenter, grâce à un montage efficace, des images fortes et des interviews exemptes de toute censure des partisans de l’arme nucléaire et de ceux qui dénoncent cette arme inutile et dangereuse. Refusant un positionnement uniquement protestataire, ce documentaire compile des témoignages de scientifiques, de militaires, d’historiens, d’hommes politiques et de simples citoyens engagés sur la question de la bombe atomique, afin de laisser le spectateur se faire sa propre opinion. (...)

on réalise combien le désarmement nucléaire n’est pas une lubie de quelques naïfs plus ou moins illuminés, mais une impérieuse nécessité soutenue par des femmes et des hommes qui ont exercé des responsabilités en relation directe avec l’arme nucléaire. (...)

Une impérieuse nécessité, parce que cette arme ne permet ni de prévenir ni de résoudre les conflits du monde actuel. Au contraire, sa détention par quelques États incite d’autres pays à s’en doter, accroissant ainsi les tensions internationales, comme le prouve la crise coréenne. Au cours des cinquante dernières années, les incidents graves se sont multipliés, comme le rapporte le film. Si, par malheur, cette arme était utilisée, elle détruirait la planète plus sûrement encore que le changement climatique.
Le film La Bombe et nous rappelle que ces armes ont déjà tué par le passé entre 150.000 et 250.000 personnes (...)

Les pressions exercées par le lobby militaro-industriel

Le film donne la parole à un ancien ministre de la Défense britannique et à un général français qui dénoncent les pressions exercées par le lobby militaro-industriel pour toujours accroître les arsenaux nucléaires et construire des missiles toujours plus chers.
Le Prix Nobel de la Paix 2017 attribué à la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (Ican), qui fait suite à l’adoption par 122 pays de l’Assemblée générale des Nations unies du traité d’interdiction des armes nucléaires (soit les deux tiers des États représentés à l’ONU), montre l’inquiétude et la volonté d’agir grandissantes au sein de la communauté internationale. Son adoption est un pas en avant important, alors que piétinent les négociations sur le Traité de non-prolifération (TNP). Il permettra d’accroître la pression sur les États détenteurs de l’arme nucléaire et de stigmatiser ces armes comme l’ont été les armes chimiques et biologiques ainsi que les mines antipersonnel.
Face à cela, notre pays, qui dispose du troisième arsenal nucléaire le plus important au monde, devrait prendre conscience que seule une sécurité collective négociée de manière multilatérale à l’ONU assurera la sécurité internationale, et que le Président français aurait beaucoup à gagner à se positionner en chef de file d’un « nouveau monde » apaisé. (...)