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le Monde Diplomatique
Les économistes à gages sur la sellette
Article mis en ligne le 6 avril 2012
dernière modification le 4 avril 2012

Editoriaux, matinales radiophoniques, plateaux de télévision : en pleine campagne présidentielle, une poignée d’économistes quadrillent l’espace médiatique et bornent celui des possibles. Présentés comme universitaires, ils incarneraient la rigueur technique au cœur de la mêlée idéologique. Mais leurs diagnostics seraient-ils aussi crédibles si ces « experts » rendaient publiques leurs autres activités ?

On appelle cela l’« effet Dracula » : à l’instar du célèbre vampire des Carpates, les arrangements illégitimes ne résisteraient pas à leur exposition au grand jour. Ainsi, la révélation en 1998 de l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), négocié secrètement pour accentuer la libéralisation économique, avait conduit à sa désintégration.

Cette fois, la controverse concerne la collusion entre économistes et institutions financières. Nombre d’universitaires invités par les médias pour éclairer le débat public, mais aussi de chercheurs appointés comme conseillers par les gouvernements, sont en effet rétribués par des banques ou de grandes entreprises. Un expert peut-il, « en toute indépendance », prôner la dérégulation financière quand il occupe simultanément un poste d’administrateur d’un fonds d’investissement ?

Ces liaisons dangereuses, sources de conflits d’intérêts, ne sont pas secrètes. Mais leurs bénéficiaires se gardent bien d’en faire la publicité. (...)

Jetons de présence aux conseils d’administration de grandes sociétés (35 000 euros par mandat, en moyenne, pour les sociétés du CAC 40 et la moitié pour les autres sociétés cotées, selon les chiffres de l’Institut français des administrateurs [IFA]), conférences privées (que Lorenzi, par exemple, facture 6 600 euros), rédaction de rapports rémunérés… Tout comme leurs collègues américains, les économistes hexagonaux « disposent d’innombrables moyens de gagner beaucoup, beaucoup d’argent, observe DeMartino. Ils savent pourtant mieux que d’autres que rien n’est gratuit, que tout bénéfice implique un coût. Et le coût, ici, c’est la perte d’indépendance.  » (...)

L’information des Français ne souffrirait peut-être pas d’une amputation trop sévère si la presse consacrait davantage d’espace — quelques lignes, quelques secondes d’antenne — à une présentation complète de ses experts : « Ce serait d’ailleurs tellement simple que je m’étonne que ce ne soit pas déjà le cas », nous répond l’économiste Hubert Kempf, président de l’Association française de science économique (AFSE), réputée « orthodoxe ». (...)

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