
Le Pentagone doit dévoiler la semaine prochaine la nouvelle stratégie nucléaire de Donald Trump et les critiques mettent déjà en garde contre le risque de déclencher une nouvelle course aux armements ou un conflit atomique par accident.
Les fuites d’un document de travail de la Nuclear Posture Review montrent que le ministère américain de la Défense souhaite le développement d’un nouveau type d’arme nucléaire d’une puissance assez faible pour être employée sur le champs de bataille plutôt que de servir à vaporiser une mégalopole.
Ces armes nucléaires "tactiques" sont incomparablement moins puissantes que les armes stratégiques qui servent de fondement à la doctrine de dissuasion nucléaire résumée par l’acronyme MAD ("Destruction mutuelle assurée" mais qui veut aussi dire "fou" en anglais).
C’est ce tout ou rien qui semble faire penser aux auteurs de la nouvelle posture que les armes de l’arsenal américain sont tellement puissantes que personne ne peut croire qu’elles seront jamais utilisées.
L’ébauche du document qui a fuité affirme que le fait que l’Europe soit à portée de ce genre d’armes détenues par les Russes, donne à ces derniers un "avantage coercitif dans des crises ou des conflits limités".
"Corriger cette impression fausse qu’ont les Russes est un impératif stratégique", selon le document, obtenu par le Huffington Post. (...)
Toute bombe nucléaire affichant une puissance inférieure à 20 kilotonnes est classée "faible puissance". C’est l’ordre de grandeur des deux bombes ayant détruit respectivement Hiroshima et Nagasaki. (...)
En raison de l’état des forces armées russes et des problèmes financiers du pays, Moscou craint d’être rapidement dominé en cas de conflit conventionnel avec les Occidentaux. Pour compenser, les Russes ont adopté une doctrine "escalade-désescalade" qui consisterait à faire usage en premier d’une arme nucléaire.
L’idée du Pentagone serait donc d’augmenter le nombre d’armes à faible puissance, décrites dans le document comme des "suppléments" pour dissuader la Russie ou d’autres pays. (...)
Le démocrate Adam Smith, numéro deux de la Commission des forces armées de la Chambre des représentants, dénonce cette nouvelle stratégie.
"Les recommandations de cette administration ne vont pas augmenter notre sécurité. Elles vont au contraire encourager une course aux armements nucléaires, miner la stabilité stratégique en rendant plus envisageable l’utilisation d’une arme nucléaire et augmenter les risques d’une erreur d’appréciation qui pourrait mener à la guerre atomique", a-t-il accusé.
Matthew Costlow, analyste spécialisé dans les questions de défense au National Institute for Public Policy, tempère le catastrophisme.
"L’ordre nucléaire n’est pas fragile au point d’être déstabilisé par la modification de quelques bombes par une puissance nucléaire responsable comme les Etats-Unis", juge t-il, défendant même l’argument inverse. (...)