
« Les inégalités diminuent », annonce l’Insee dans sa dernière publication sur les niveaux de vie des Français. Le pays compterait un peu moins de pauvres et l’écart avec les plus riches se rétrécirait légèrement. Mais ces bonnes nouvelles statistiques sont à prendre avec prudence : « Cette vision de la situation sociale est très partielle », prévient Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités, qui décrypte avec Basta ! les limites de l’exercice de l’Insee. Il est en tout cas prématuré d’y voir les résultats de la politique menée par François Hollande, comme tentent de s’en persuader plusieurs dirigeants socialistes.
Le pays a enregistré un million de chômeurs supplémentaires en quatre ans (5,3 millions en 2015 [1]), compte 3,7 millions d’allocataires de minimas sociaux – principalement le revenu de solidarité active (RSA), l’allocation adulte handicapé et le minimum vieillesse. Un salarié sur dix – soit 2,4 millions de personnes – est précaire, travaillant en CDD ou en intérim, un statut synonyme de période de chômage et, souvent, de faibles revenus. Les employés percevant juste le Smic augmentent, avoisinant les 3 millions. Sans oublier le mal-logement qui, selon la Fondation Abbé Pierre, concerne plus de 3,5 millions de personnes.
« L’Insee ne ment pas, mais son regard est incomplet »
L’Insee se tromperait-elle ? « L’Insee ne ment pas, mais son regard est incomplet et imparfait », répond Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités, un observatoire indépendant. « Cette vision de la situation sociale est très partielle. » Première imperfection : les chiffres les plus actuels datent de 2013, car l’Insee se base sur les données fiscales. Celles de 2014 ne seront disponibles qu’à l’automne 2015. Un an, c’est un peu court pour se réjouir des éventuels – et inattendus – bienfaits de la politique gouvernementale.
Ensuite, « on ne sait pas encore combien les 10% les plus riches ont gagné en moyenne », précise Louis Maurin. Il est donc difficile de comparer l’écart réel des niveaux de vie entre les plus pauvres et les plus riches. L’insee se contente de calculer l’écart entre les « seuils d’entrée » de chacune des catégories. (...)