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Les riches mangent dans la main des pauvres
Article mis en ligne le 1er décembre 2020
dernière modification le 30 novembre 2020

Cinq usines, bientôt huit, qui vont affamer les Sénégalais privés de leurs ressources halieutiques. Le combat d’une association suivie par CCFD-Terre solidaire pour tenter de freiner la surpêche côtière à l’origine, notamment, du drame des migrations récentes vers les Canaries.

Mangez du poisson, clament les nutritionnistes. Pas si simple, lorsque les réserves s’épuisent et que la surpêche menace encore plus l’extinction de nombreuses espèces. Comme certains Européens s’étonnent de projets industriels dans leur région (bulle tropicale, équipement touristique surdimensionné, aéroport, etc.), les Africains se révoltent contre la confiscation de leurs terres, leurs forêts, leurs zones de pêche. Les Chinois, Européens, Russes montent des usines sur les côtes poissonneuses au large du Sénégal et du Pérou pour fabriquer des farines de poisson destinées à l’aquaculture qui connaît un grand boom. Mangeurs de bars, de saumons, vous affamez les pauvres à l’autre bout de la chaîne halieutique.

Une politique criminelle

C’était pourtant l’euphorie. Les usines transformaient les déchets de la transformation des produits de la mer alors qu’en réalité, elles achètent du poisson aux pêcheurs qui ne vendent plus aux Sénégalaises gagnant leur vie aussi en transformant les poissons. (...)

Hélas, tout ceci est menacé par les usines des pays riches qui vont affamer les Sénégalais dont certains fuient déjà vers les Canaries pour éviter la famine.

Car la surpêche, cela signifie que les petits pélagiques, surtout les sardinelles, sont transformés en farine et vont manquer aux Sénégalais. Avec des taux de rendements dévastateurs : « il faut 3 à 5 kg de sardinelles, déjà surexploitées, pour produire un kilo de farine » pour nourrir des poissons d’élevage en Europe ou en Chine. Et que dire de la pollution de l’eau sortie des usines…
Que faire ?

Pour Didier Gascuel (Ecologie marine, Agrocampus, Rennes), il faut choisir les poissons sauvages, local et selon les saisons, de bonne taille, en diversifiant les espèces. En sachant que le poisson bio nécessite des farines… Il faut réduire notre consommation de produits de la mer à 8 kg/an selon la FAO (nous sommes à 20 kg actuellement).

L’Adepa (association ouest-africaine pour le développement de la pêche artisanale) mobilise les Sénégalais, les politiques, demande des informations sur les installations d’usines. Elle a obtenu que les pêcheurs puissent être reconnus comme experts dans la gestion des aires marines protégées. Un autre collectif, Taxaw Kayar (Debout pour Kayar) au nord de Dakar a obtenu que le démarrage d’une usine de farine de poisson espagnole soit suspendu. (...)

. Mais la ressource va diminuer, les emplois vont disparaître. D’autant que l’Etat fournit des moteurs qui accroissent l’épuisement de la ressource. Pire, l’implantation de l’usine est contraire au code de la pêche et de l’environnement. (...)

Face à une concurrence extérieure de plus en plus forte, ces femmes et ces hommes résistent en contribuant grâce à leur labeur à la sécurité alimentaire de nombreux pays africains. Mais pour combien de temps encore ? Que vont devenir ces travailleurs et ces populations si les rumeurs sur l’installation d’usines de farines de poisson se concrétisent ?