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Lettre ouverte du centre LGBT de Nantes à Monsieur François-Régis Hutin, directeur de la publication du quotidien ouest-france
Article mis en ligne le 22 août 2012

Monsieur Hutin,

Citoyennes et citoyens de l’ouest de la France, nous avons toutes et tous été à un moment ou un autre, lectrices et lecteurs de vos éditoriaux et ce depuis de nombreuses années déjà.

Votre plume vous a rendu célèbre, et vos prises de positions, souvent habiles, se caractérisent par une pondération que certaines et certains vous reprochent bien souvent. Mais il arrive parfois que vos éditoriaux deviennent obsessionnels, notamment lorsqu’il s’agit de sujets qualifiés de sociétaux. Ainsi, ce que vous nommez « mariage homosexuel » semble hanter votre esprit au point de vous faire oublier toutes les règles de prudence qui vous sont pourtant habituelles. Pas de demi-mesure sur cette question ! Libérée, votre expression s’emballe au point de paraitre déraisonnée, et surtout contradictoire.

Déjà, le 1er juillet dernier, une journaliste avait eu l’occasion de s’exprimer à ce sujet dans vos colonnes, par le biais d’un éditorial intitulé « des repères stables pour surmonter la crise ». Vous voudrez bien excuser la faiblesse qui nous pousse ici à la citer : « En Europe, la famille est la cellule de base de la société. Le système de parenté se définit dans le cadre de l’union de l’homme et de la femme. Le mariage a aussi été créé pour définir la filiation qui permet à chacun de savoir d’où il vient et pour protéger les femmes ». Ainsi donc, elle nous expliquait que le mariage a bien été créé pour protéger les conjoint-e-s et leurs éventuels enfants, notamment face aux imprévus et aux accidents de la vie.

Dès lors, nous ne pouvons que nous étonner lorsque vous affirmez : « au reste, on peut se demander quelles sont les raisons de la revendication du mariage par les homosexuels. A l’heure même où le mariage est décrié, abandonné, remplacé par la pratique généralisée du concubinage, ce que l’on appelait autrefois l’union libre, alors même qu’en France 50 % des mariages donnent lieu à divorce, pourquoi le mariage devient-il si essentiel à ces personnes ? ».

« Ces personnes », ici qualifiées avec une certaine forme de mépris, vous répondront qu’elles souhaitent tout simplement avoir les mêmes droits que vous et votre famille. « Ces personnes »souhaitent pouvoir divorcer comme tout le monde. Elles veulent aussi pouvoir « définir la filiation qui permet à chacun de savoir d’où il vient et (aussi) protéger les femmes ». Ces personnes, parce que profondément humaines, souhaitent aussi pouvoir pratiquer l’héritage, le népotisme, le concubinage… et toutes les petites faiblesses propres à notre fragile humanité. (...)

comme vous, nous affirmons aussi que cette République laïque, à laquelle vous vous référez autorise, bien entendu la prière, et nous n’avons jamais remis en cause cette liberté fondamentale. Cela est d’ailleurs tellement vrai, que parmi « ces personnes », il en est de nombreuses qui prient, y compris pour que le mariage pour tous les couples voie enfin le jour. Et puis d’autres parmi nous ne prient pas. Cette richesse de vues, de croyances et de convictions témoigne pleinement de notre refus de toute forme de communautarisme. Nous affirmons aussi que les lois de notre société ne doivent pas être fondées sur des croyances mais sur des réalités qui méritent en effet qu’on en débatte. (...)

Votre emballement nous est incompréhensible, car il nous semble être assez éloigné des valeurs de la République. Car c’est bien au nom de la République que nous demandons que la Liberté, l’Égalité et la Fraternité soient traduits en droit. C’est au nom de la République que nous demandons à ce que tous les modèles familiaux soient reconnus et protégés par la loi. Et c’est aussi au nom de la République que nous refusons que soit stigmatisé le modèle familial que vous défendez, même si ce dernier, vous en convenez d’ailleurs, est aujourd’hui minoritaire. (...)