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Le Monde
Lors du procès d’Eric Zemmour pour « complicité de provocation à la haine raciale », le parquet requiert la condamnation
Article mis en ligne le 18 novembre 2021

Le polémiste d’extrême droite était cité à comparaître suite à des propos tenus sur la chaîne CNews, en septembre 2020. Il avait qualifié les mineurs isolés de « voleurs, violeurs et assassins ».

Le parquet a requis, mercredi 17 novembre, 10 000 euros d’amende, avec possibilité d’emprisonnement en cas de non paiement, à l’encontre du polémiste d’extrême droite Eric Zemmour, jugé devant le tribunal correctionnel de Paris, pour ses propos controversés sur les mineurs isolés.

« Au vue de la violence des propos et du contexte dans lequel ils ont été prononcés », et du fait que M. Zemmour a « déjà un passé judiciaire », la procureure a demandé « 100 jours amende à 100 euros ». Ses « propos méprisants, outrageants » montrent « un rejet violent » et une « détestation » de la population immigrée, a encore estimé la procureure dans ses réquisitions. Eric Zemmour est coupable de provocation à la haine et d’injure raciale, a-t-elle aussi déclaré. « Les limites de la liberté d’expression ont été franchies. » La décision du tribunal a été mise en délibéré et sera rendue le 17 janvier.

« Ce n’est pas un accident de langage, il persiste et signe », constate la procureure dans ses réquisitions. Les expressions utilisées « synthétisent les mécanismes de la haine », il use « du lexique de la guerre », parle « d’invasion, de conquête », avance-t-elle. Il fonctionne par « généralisations, un procédé classique du racisme », ajoute-t-elle, souhaitant « insister » sur le danger de la « banalisation du discours d’un ennemi commun ». (...)

« On essaie de faire croire que ces audiences sont liées au statut de candidat putatif de M. Zemmour », a dit plus tôt, à la barre, Dominique Sopo, président de SOS Racisme, partie civile au procès. Mais les associations anti-racistes ont « assez peu » l’habitude de poursuivre les candidats à la présidentielle (...)

« Le discours d’Eric Zemmour est dangereux parce qu’il y a des abrutis (…) prêts à passer à l’acte », abonde Samuel Thomas, président de La Maison des potes, également partie civile au procès.
Les conseils départementaux parties civiles

Outre des associations comme SOS-Racisme, la Ligue des droits de l’homme ou la Maison des potes, une vingtaine de conseils départementaux se sont également constitués parties civiles : les mineurs non accompagnés sont pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, gérée par les départements. (...)

« Il s’agit de jeunes qui ont le droit à la protection et à un accueil digne », avait déclaré à l’Agence France-Presse le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (Parti socialiste), qui s’est aussi constitué partie civile : « Nous ne pouvons tolérer les amalgames et le racisme dont ce fossoyeur de la République est coutumier. » (...)

Sa parole n’est « pas une opinion, elle est un délit »

« Nous sommes aujourd’hui objectivement dans un moment d’hégémonie de la pensée raciste », a dit Me Arié Alimi, premier parmi les parties civiles à plaider, pour la LDH. M. Zemmour « a vocation à se présenter à la présidentielle, et il y a une possibilité qu’il devienne président de la République », insiste-t-il, appelant le tribunal à être ferme « dans un moment d’Histoire où tout peut se passer ». « La parole d’Eric Zemmour n’est pas une opinion, elle est un délit », a, de son côté, martelé Me Jérôme Karsenti, demandant une condamnation qui « rappelle » cela. (...)

Les propos tenus à l’antenne sont « intolérables » et laissent entendre que « tout mineur isolé est un délinquant en puissance qui vient en France pour commettre des exactions », a estimé Me Klugman, l’avocat de SOS-Racisme. « C’est l’essence même du racisme. » (...)

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a d’ores et déjà sanctionné, en mars, CNews d’une amende de 200 000 euros, pour « incitation à la haine » et « à la violence ».

« Contrainte » par une décision du CSA, la chaîne avait annoncé à la mi-septembre que M. Zemmour, locomotive des audiences depuis son arrivée sur la chaîne en 2019, n’interviendrait plus dans l’émission. Plusieurs voix s’étaient auparavant élevées pour dénoncer la tribune offerte chaque jour à un potentiel candidat à l’élection présidentielle. (...)

Ses propos lui ont valu, depuis une dizaine d’années, une quinzaine de poursuites en justice. Plusieurs fois relaxé, il a été condamné deux fois pour provocation à la haine