
Nous sommes la France d’aujourd’hui
Nous sommes des citoyen·ne·s engagé·e·s dans la cité, nous militons dans des partis politiques, nous agissons dans nos associations, nous écrivons et enquêtons pour des médias professionnels indépendants, nous fabriquons de la connaissance et des données dans des universités et des laboratoires, nous sommes élus et élues locales, ou étudiant·e·s menacé·e·s par la précarisation. Nous sommes celles et ceux qui voudront bien se retrouver dans cet appel.
Nous héritons des cultures juives, chrétiennes et musulmanes, de celles issues des philosophies émancipatrices, certain·e·s d’entre nous prient et lisent des textes sacrés, d’autres se revendiquent agnostiques ou athées, luttent contre les dogmes religieux, répandent la bonne parole du Pastafarisme.
Et certainement plus que tout cela, car nos identités ne s’arrêtent pas à nos héritages ni à nos pratiques. Tenter de nous y résumer, c’est déjà empêcher de comprendre l’autre. Tout comme une nation n’a pas à avoir "d’identité", le "français moyen" n’existe pas, pas plus que celui "de souche".
Enfants de la République, identifiée à la démocratie, nous voulons préserver ses principes fondateurs que sont la liberté, l’égalité et la fraternité, qui permettent le débat, l’échange d’arguments, la dispute, y compris la querelle. Et c’est la loi de 1905 qui rend possible l’expression de ces grands principes, en participant au socle législatif garantissant nos libertés individuelles et collectives.
La laïcité est notre rempart contre l’exclusion et la discrimination.
La dérive qui vient
Or, depuis quelques années, se diffuse une petite musique mortifère : l’idée qu’une des religions dans ce pays, l’islam, serait incompatible avec la République. Qu’il faudrait donc en encadrer les pratiquants, les surveiller plus que d’autres, parce que leur pratique contiendrait en germe le risque d’un basculement vers l’islamisme politique, voire vers le terrorisme. On en guette les signes ostensibles, on ostracise les musulman·ne·s en jouant sur les mots de la discrimination. Islamophobie ? Racisme anti-musulman·e·s ? Qu’est ce donc qu’un pays qui préfère débattre pendant des heures sur les mots, plutôt que sur les faits qu’ils qualifient ?
Nous sommes las des "talkshows" au cours desquels le moindre fait divers est prétexte à légitimer des clichés éculés et des appels à la haine, de ces expressions forgées à l’extrême-droite ou importées de l’alt-right américaine, qui saturent les médias et certains discours politiques.
Nous alertons sur les dangers d’une rhétorique martiale, traduite en législations dont les contenus menacent les libertés fondamentales et ostracisent des communautés entières.
Nous constatons la multiplication des diffamations et des intox sur les réseaux sociaux, relayées par des complices au mieux naïfs, au pire parfaitement conscients qu’ils font le jeu d’une extrême-droite toujours aussi raciste, antisémite, islamophobe et xénophobe.
Un pilier de la République
Dans cette atmosphère inquiétante, il est impératif de protéger la laïcité, telle que définie par la loi fondatrice de 1905, et qui trouve sa première expression pendant la Commune de Paris de 1871, qui affirme alors comme première des libertés, la liberté de conscience (décret du 2 avril 1871). C’est un projet de société simple, lumineux, universel : séparer les Eglises de l’Etat, et donc instaurer la stricte neutralité de l’administration publique et de ses représentant·e·s vis-à-vis des croyances ou de la non-croyance des citoyen·ne·s.
C’est ce principe que l’Observatoire de la Laïcité fait vivre depuis 2013, avec peu de moyens et beaucoup d’énergie, en toute indépendance, au contact des élèves dans les écoles, auprès des administrations et des élu·e·s dans les territoires, auprès des représentant·e·s de l’Etat.
D’accord avec Jean-Louis Bianco, le Président de l’Observatoire, nous affirmons que la laïcité est un pilier de la République, parce qu’elle permet un équilibre entre ses lois et la liberté des convictions. La laïcité se construit, elle s’explique, elle ouvre le débat. En aucun cas, elle ne doit devenir une bureaucratie supplémentaire, inféodée au gouvernement et circonscrite par ses courtisans.
La laïcité est notre bien commun
La laïcité est notre bien commun, nous voulons la préserver, pleine et entière, contre les formidables coups de boutoir qu’elle subit aujourd’hui. Elle n’est ni "de combat", ni "apaisée", ni "positive", ni "nouvelle". La laïcité doit être, un point c’est tout. (...)