
Le moteur de recherche Google et le réseau social Facebook jouissent d’un quasi-monopole dans leur domaine. Leur point commun ? Ils collectent massivement les données personnelles de leurs utilisateurs à des fins publicitaires. Mais quelques "irréductibles Gaulois" veulent construire un web plus éthique. Parmi eux, Qwant, Lilo ou encore Whaller promettent des services protecteurs de la vie privée.
« Big Brother is watching you ». À l’image du fameux roman 1984 de George Orwell, Google et Facebook semblent tout savoir de leurs utilisateurs. Âge, sexe, centre d’intérêts, orientation sexuelle... Autant de données personnelles massivement collectées par les deux géants américains à des fins publicitaires. À contre-courant, une poignée d’entreprises françaises veut conjuguer innovation et respect de la vie privée.
« Notre vie numérique devrait respecter nos libertés individuelles. Il ne faut plus chercher à faire comme les grands d’Internet : il faut faire différemment », martèle Thomas Fauré, président et fondateur du réseau social Whaller, startup de 10 employés.
Lancée en 2013, cette plateforme « made in France » garantit la protection des données. (...)
Etre conscient de son pouvoir en tant qu’internaute, c’est aussi le mantra de Lilo. Ce moteur de recherche, qui compte une dizaine d’employés entre Paris et Nantes, a été créé en 2015. Son constat : « Grâce à ses requêtes sur Internet, chaque internaute génère en moyenne 30 euros de revenus aux moteurs de recherche, revendique Clément Le Bras, cofondateur et directeur de la startup. C’est donc lui qui devrait posséder le pouvoir ! », et avoir notamment un droit de regard sur la destination de l’argent généré. (...)
La promotion d’un web éthique passe aussi par le respect de la vie privée. Ainsi, Lilo s’engage à ne pas collecter, exploiter ou revendre les données de ses utilisateurs. Les adresses IP, permettant l’identification d’un ordinateur, sont anonymisées. Des arguments qui ont déjà convaincu près de 680.000 utilisateurs - avec un rythme de 4.000 nouveaux utilisateurs par jour.
Protéger ses données, un souci d’initiés ?
C’est aussi ce qui fait le succès de Qwant, acteur historique en la matière. Lancé il y a 5 ans, le moteur de recherche revendique désormais 58 millions d’utilisateurs uniques par mois depuis janvier 2018 - contre 20 millions il y a un an. Et il enregistre « une croissance de 20% par mois » (...)
Reste à convaincre les investisseurs. « Ils ne sont pas encore sensibilisés à la question. Quand j’arrive en disant que je veux créer un anti-facebook, tout le monde rigole ! », raconte Thomas Fauré de Whaller.
Vers une souveraineté numérique ?
Au-delà des investisseurs, les internautes sont aussi difficiles à convaincre. « Il y a un frein psychologique, presque une addiction. Quand les gens testent un autre moteur de recherches que Google, ils sont perdus, estime Clément Le Bras, président de Lilo. On ne s’en rend pas compte, mais cela fait 15 ans maintenant que des gens voient tous les jours la marque Google. Cela paraît anecdotique, mais très peu de marques ont sa visibilité. »
Pour lutter contre ce manque de notoriété, toutes ces entreprises développent des partenariats avec des entreprises et des organismes publics (écoles, ministères, universités...). « Le rôle de la société civile et politique est primordial. Il faut pousser à l’utilisation de plateformes françaises pour construire une souveraineté numérique », revendique Thomas Fauré. Une vision partagée par Eric Léandri, PDG de Qwant. (...)