Alexis Tsipras est devenu ce vendredi 14 août, le quatrième Premier ministre des mémoranda, faisant tristement suite à Papandréou, à Papadémos et à Samaras. Le mémorandum III vient d’être adopté par un “Parlement” et par un gouvernement “légiférant” en violation de la Constitution et contre la volonté populaire exprimée par le 62% du ‘NON’ ; élus pourtant, par une... majorité citoyenne anti-mémorandum. La Constitution a été piétinée comme d’usage et comme souvent en Europe européiste. SYRIZA n’est donc plus, plus comme avant en tout cas.
(...) Le “cheval” et ses Troïkans ont finalement pénétré les remparts de la cité et tout tend à démontrer que c’est pour la “longue durée”. Passant par le biais d’un État Grec et de son système politique, toujours plus satellisés, SYRIZA d’en haut compris, la Troïka (institutions), à force de concentrer sur elle-même l’essentiel des pouvoirs, serait parvenue à s’immiscer en chaque chose jusque dans les moindres aspects de la vie privée des “citoyens”, et déjà à l’essentiel : la survie de tous. (...)
Le Mémorandum, entité d’abord immatérielle et invisible, s’est rapidement concrétisé et par quelle violence, au point de dégrader les hommes, les liens sociaux, les imaginaires et le rapport au temps. SYRIZA avait été porté au pouvoir justement parce qu’il a expressément incarné l’espoir enfin concrétisé de briser cette entité ainsi concrétisée.
Ce “programme”, alors très vaste dès sa conception, le demeura de toute évidence encore longtemps. Le Mémorandum et le “droit des créanciers” deviendraient alors de vérités ne varietur une fois de plus et une fois de trop, reposant sur une autorité présentée comme transcendante, la Troïka, régnant sur les débris d’un pouvoir social, politique et sociétal dont la légitimité se dissipe dans un processus prétendument inéluctable.
La dette, alors est ce vecteur et prétexte inhérent au totalitarisme nouveau. Vendredi 14 août au matin, Zoé Konstantopoúlou (Présidente de l’Assemblée... pour l’instant) avait très exactement interpelé Alexis Tsípras sur la question de la Commission d’audit de la dette grecque (mise en place par le Parlement grec et présidée par Éric Toussant), et sur ses travaux, lesquels n’ont pas été... considérés par les ministres Tsipriotes, il en est de même semble-t-il, de la Commission sur les réparation de guerre de l’Allemagne... comme par hasard.
Pis encore, a-t-elle poursuivi, toutes les actions entreprise très précisément par le gouvernement : les quatorze aéroports vendus au consortium allemand, la privatisation annoncée de la Régie d’Électricité, le... retournement complet dans le dossier de l’exploitation des mines d’or à Skouriés au Nord de la Grèce, ces procédures anticonstitutionnelles en vue de faire passer le mémorandum, tout cela relève plutôt “d’un choix stratégique que le gouvernement a certainement cautionné (le mémorandum), au-delà du chantage, c’est plutôt d’une ligne politique qu’il s’agit, une ligne politique bien perceptible si l’on tient compte par exemple des déclarations (printemps 2015) du ministre Stathákis, prétendant que seulement 5% de la dette grecque serait à remettre en question” (je cite de mémoire). Ainsi, Zoé Konstantopoúlou a... officiellement retiré sa confiance au gouvernement, ainsi qu’en la personne d’Alexis Tsipras. Rupture. (...)
D’ailleurs, jeudi soir (13 août), Zoé Konstantopoúlou dénonçait déjà les agissements des ministres SYRIZA, ces derniers venaient tout juste de déposer une myriade d’amendements... surprise dans l’après-midi, certains alinéas introduits imposent des changements à effet rétroactif au régime des retraites, ce qui est formellement interdit par la Constitution, car aucune disposition concernant le régime des retraites ne peut être déposée séparément d’un projet de loi, spécifiquement et exclusivement rédigé dans ce but, et cela d’ailleurs sans consultation de l’équivalent du Conseil Constitutionnel.
Aux heures du (si) petit matin, et suite à une pirouette procédurale suggérée par le népotiste Pasokien Venizélos et acceptée par le gouvernement, l’affaire des amendements a été jugée conforme à la Constitution. Panagiótis Lafazánis, chef de la Plateforme de Gauche (...SYRIZA) a pris aussitôt la parole vers 5h du matin, visiblement en colère car très déçu (...)
Jusqu’à 43 députés SYRIZA sur 149 n’ont pas suivi les Tsipriotes dans ce suicide éthique et politique : 32 ont voté contre, et 11 se sont abstenus. Notons que les députés n’ont pas eu le temps de lire les textes (à part un résumé) - déclaration d’une députée SYRIZA dans l’après-midi du 14 août à la radio 105,5 (de SYRIZA), alors mascarade, trahison et désolation. (...)
Alexis Tsípras sollicitera la confiance du “Parlement”, “une fois que la Grèce aura remboursé une échéance de 3,2 milliards d’euros à la Banque centrale européenne (BCE) le 20 août, a déclaré, vendredi, un responsable gouvernemental. Dans ce climat, la perspective d’élections anticipées à l’automne, alors qu’il est toujours très populaire, prend de plus en plus de corps”, note une certaine presse économique mainstream. Journée donc très sombre pour la Grèce et pour la Gauche (ou plutôt “Gauche”) ce vendredi 14 août. Mémorandum adopté, le gouvernement Tsipriote se doit à demander un vote de confiance, 118 élus de la majorité lui ont été acquis (moins que 120, taille critique pour qu’un gouvernement puisse rester en place), 32 députés SYRIZA ont voté non, 11 se sont abstenus et un élu était absent.
Panagiótis Lafazánis et la Plateforme de Gauche annonçant la création prochaine d’un nouveau pôle politique contre le mémorandum tandis que Zoé Konstantopoúlou (Présidente de l’Assemblée) qui ne la préside pas en ce moment, étant résolument opposée au mémorandum, elle a qualifié le ministre du budget Mardas, de presque “collabo”. Ruptures encore (...)
Je fais court (pour l’instant). Sans prétendre à aucun conspirationnisme et seulement, d’après les éléments dont nous disposons (déclarations et actes des acteurs politiques et Grèce et ailleurs), le... Plan B de la Troïka se nomme SYRIZA. Des hommes politiques Syrizistes de premier rang (Stathákis et Dragasákis par exemple) incarnent ce rôle depuis d’ailleurs longtemps. Le chantage bien réel (connu et inconnu) par contre, celui que les maîtres-fous de l’Eurogroupe ont exercé sur Tsipras aura façonné la suite. Depuis un certain temps, tout le monde remarque que le regard ainsi que le langage du corps d’Alexis ne sont plus les mêmes qu’avant. Mutation ?
Il ne faut pas cependant oublier l’aveuglant européisme d’Alexis Tsipras, réitéré ce dernier temps et à chaque occasion, ce même européisme inspirant... le néant politique aux tenants et aux ténors visibles de la triste “Gauche” en Europe. Seulement, Alexis Tsipras (malgré lui ?) ainsi... que l’imposture SYRIZA, auront pour les historiens cet énorme mérite, que d’avoir accéléré l’histoire et autant, les consciences. À la manière d’un catalyseur... forcement consommé. (...)