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Mexique : Barbare, vraiment ?
Article mis en ligne le 28 décembre 2017
dernière modification le 27 décembre 2017

Seuls l’Irak et l’Afghanistan font pire : au Mexique, 105 journalistes sont morts assassinés depuis l’an 2000. À l’occasion d’une tournée en France, le reporter Sergio Ocampo dresse le portrait d’un pays ni vraiment en paix, ni très démocratique.

Trente‑six journalistes mexicains ont été tués depuis 2012, début du mandat du président Enrique Peña Nieto. Et sept depuis le début de l’année, dont Javier Valdez et Miroslava Breach, correspondants à Sinaloa et Chihuahua du quotidien de gauche La Jornada, dans lequel écrit Sergio Ocampo. CQFD l’a rencontré dans les locaux de Solidaires, à Marseille. Dans l’État méridional du Guerrero, où il vit et travaille, « treize de [s]es confrères ont été abattus ces dernières années ». Et l’impunité règne. « Si l’on en croit le gouvernement, la gâchette est toujours actionnée par des sicarios [1] des cartels de la drogue, dans les affaires desquels les victimes auraient imprudemment mis le nez. Ce serait donc presque de leur faute… En tout cas, aucun de ces meurtres n’a été élucidé. »

Enquête à la ramasse

Sergio Ocampo a été témoin de « la nuit d’Iguala », quand 43 élèves de l’école normale d’Ayotzinapa ont disparu entre le 26 et le 27 septembre 2014. Ce soir‑là, prévenu, il a accouru sur les lieux, alors que cinq cadavres jonchaient encore l’asphalte et que l’escamotage des étudiants était en cours. « À peine arrivés sur place, mes collègues et moi avons essuyé une rafale d’arme automatique. C’était en pleine conférence de presse des rescapés, sur le bord d’un trottoir. » Trois ans ont passé et la « vérité historique » proclamée par le procureur de la République n’a jamais convaincu personne. Selon cette version officielle, des policiers municipaux corrompus auraient livré les jeunes activistes à des hommes de main du cartel Guerreros Unidos, qui les auraient ensuite exécutés, puis incinérés dans la décharge publique de Cocula.

Depuis, les familles des disparus et la Cour inter-américaine des droits humains réclament des éclaircissements. (...)

La guerre contre le narcotrafic, déclarée par le président Felipe Calderón en 2006 et reconduite sans la nommer par l’actuelle administration, a fait quelque 120 000 morts et près de 30 000 disparus – la plupart étant des victimes collatérales. De plus, cette guerre, qui singe la War on drug lancée en 1969 par Richard Nixon, s’est avérée aussi biaisée qu’inefficace : le gouvernement Calderón avait joué le cartel de Sinaloa contre celui du Golfe, fomentant ainsi l’apogée du règne du Chapo Guzmán, parrain aujourd’hui en prison aux États‑-Unis.(...)

comme le dit si bien un blondinet de la Drug enforcement agency (DEA) dans la série Narcos à un yuppie de Wall Street qu’il surprend en train de sniffer un rail de cocaïne dans les toilettes de l’aéroport de Bogotá : « Tu sais combien coûte le gramme de coke que tu viens de t’envoyer ? Six morts. » Au bas mot.