
Alors que le dépôt de la deuxième partie du dossier de candidature pour les Jeux de 2024 est attendu pour le 7 octobre 2016, des associations et des intellectuels dénoncent une opération de communication lancée à grands frais par la mairie de Paris.
Le coût de la candidature aux JO 2024 (frais de candidature à verser au CIO, déplacements, plans de communication, honoraires des cabinets de consultants, frais généraux, etc.) est aujourd’hui estimé à 60 millions d’euros dans le cadre d’un « budget évolutif » pouvant aller jusqu’à 100 millions en fonction des besoins. (...)
Compte tenu de l’augmentation massive du chômage, de l’exclusion, de la précarité et de la pauvreté en France (6 millions de chômeurs, 8 millions de pauvres), et dans un contexte marqué par des mesures d’austérité qui frappent tous les secteurs de la vie publique, nous estimons qu’il y a d’autres priorités qu’une candidature dispendieuse aux JO. (...)
L’explosion systématique des budgets prévisionnels
A l’heure où l’Etat se désengage des missions qui lui incombent, un abondement exceptionnel de 10 millions d’euros pour assurer le bon fonctionnement du Groupement d’intérêt public « Paris 2024 » a déjà été débloqué. Si la ville de Paris était choisie par le CIO en septembre 2017, 3 milliards de fonds publics seraient encore versés dans un budget prévisionnel global de 6,2 milliards d’euros. Paris et le Conseil régional d’Ile-de-France ont ainsi promis de verser 145 millions d’euros chacun pour rénover des infrastructures sportives essentiellement réservées au haut niveau, sélectionner une élite, moderniser des transports en vue d’accueillir les touristes. Or, il faut s’attendre à une augmentation considérable des dépenses !
Pour quasiment tous les Jeux, les budgets prévisionnels ont en effet explosé (Athènes : +109% de dépassement, 11,1 milliards ; Pékin : +1130%, 32 milliards ; Londres : +127%, 11 milliards ; Rio : +247%, 33 milliards, selon Le Monde et Wladimir Andreff, 25 février 2015). Pour les JO de Tokyo 2020, le budget de construction dépasse actuellement les 4 milliards d’euros pour une prévision initiale de 1,3 milliard (AFP, 28 septembre 2016).
Tandis que le CIO est exonéré d’impôts et que les retombées économiques bénéficient majoritairement à ses partenaires commerciaux, les populations sont obligées de supporter le poids de la dette pendant plusieurs années, comme ce fut le cas pour Grenoble en 1968 et Albertville en 1992. Alors que l’hôpital public, le logement social, les transports en commun, l’éducation, la recherche scientifique, la culture subissent des restrictions budgétaires régulières, nul ne peut sérieusement espérer que l’opération de prestige olympique offre une réponse réaliste à la crise globale.
De l’emploi des « travailleurs jetables »
Les édifices olympiques bâtis en un temps record sous l’égide de « lois olympiques » d’exception, mobilisent toujours une majorité de « travailleurs jetables » et d’intérimaires, quand ce ne sont pas, comme à Pékin, à Sotchi ou à Rio, des migrants ou des personnes déshéritées traités comme des esclaves. (...)
La spéculation immobilière engendrée et nourrie par la réalisation d’infrastructures olympiques luxueuses va une nouvelle fois toucher les quartiers populaires. Prix du foncier et de l’immobilier, loyers et impôts locaux vont grimper, alimentant la gentrification et enrichissant les actionnaires des groupes BTP et des promoteurs, au détriment du logement social et des classes populaires déjà frappés par la crise du logement. Au nom du gigantisme olympique, les multinationales du béton armé n’hésiteront pas à saccager des patrimoines naturels et culturels (les Serres d’Auteuil, entre autres, seront délabrées en raison de l’agrandissement de Roland-Garros), ni à laisser, comme pour tous les Jeux dits « verts », un bilan énergétique désastreux (empreinte carbone de plusieurs millions de tonnes pour chaque JO, gaspillage, pollution des cours d’eau, bétonnage massif, etc.). La concentration de millions de touristes et la multiplication des déplacements ne feront qu’amplifier les « pics de pollution » dans la capitale et ses banlieues déjà saturées par les embouteillages, alors que les maladies respiratoires, en hausse constante, nécessitent une prise en charge qui coûte près de 2 milliards d’euros par an à l’État.
Le coût de la surveillance (...)
Les décisions qui concernent l’avenir des citoyens ne doivent pas être confiées aux hiérarques du CIO qui ne choisiront le vainqueur de leur course aux enchères qu’en fonction de leurs propres intérêts et de ceux de leurs partenaires commerciaux (Mc Donald’s et Coca-Cola notamment).
Pour toutes ces raisons, nous appelons les élus, les responsables politiques, associatifs et syndicaux, ainsi que tous les citoyens à refuser cet indécent gaspillage financier, économique et écologique qui ne bénéficiera qu’à la multinationale du CIO, souvent impliquée dans divers scandales d’affairisme et de corruption.