
Dans une lettre qu’Inf’OGM s’est procurée, une trentaine d’organisations professionnelles et syndicats agricoles demandent aux députés français « de rejoindre la coalition européenne pour une révision de la directive 2001/18 ». En clair, elles visent à rendre invisibles les nouveaux OGM.
La FNSEA, syndicat agricole majoritaire, et ses alliés, comme d’autres syndicats par filière (betterave, maïs, levures, semences, etc.), le GNIS et Terres Inovia sortent du bois [1]. Dans une lettre aux députés français qu’Inf’OGM s’est procurée, ces organisations demandent à la France « de rejoindre la coalition européenne pour une révision de la directive 2001/18 », la directive qui encadre l’ensemble des OGM, qu’ils soient issus de la transgenèse ou d’une mutagénèse. (...)
Cette coalition, emmenée par les Pays-Bas, regrouperait 12 États membres, selon les signataires. Elle exige tout simplement que l’arrêt de la Cour de justice de l’UE ne soit pas mis en œuvre, car il serait contraire aux intérêts économiques à court terme. Cet arrêt confirmait ce que d’autres organisations paysannes et agricoles soulignaient depuis des années : les OGM ne se résument pas aux plantes transgéniques et les autres OGM présents sur le marché doivent donc être évalués et étiquetés.
La souveraineté alimentaire ne passera pas par les OGM...
L’argument pour réviser la directive est que celle-ci impose « de longues et coûteuse démarches d’homologation pour les variétés obtenues par des techniques de mutagénèses développées après 2001 ». Pour les partisans de la révision, ces démarches menacent « la souveraineté alimentaire de la France et de l’Europe ». Pourtant, cet argument n’a pas de fondement économique : les plantes transgéniques n’ont été que très peu cultivées sur le sol européen du fait de la mise en œuvre du principe de précaution sans que cela ait eu un effet sur notre souveraineté alimentaire. Selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la « disponibilité protéinique moyenne » en France n’a que peu évolué au cours des 20 dernières années. (...)
Si les consommateurs exigent des « produits sains, sûrs, durables et d’origine locale », on sait portant qu’ils refusent aussi les OGM. Et que, globalement, ils n’associent pas des produits sûrs et sains à des produits brevetés et issus de manipulations génétiques et multiplication cellulaire in vitro réalisées hors sol, en laboratoire. Et surtout ne pas vouloir étiqueter ces nouveaux OGM comme des OGM ce n’est pas répondre aux besoins des consommateurs mais au contraire les prendre pour des cobayes. Les semences paysannes semblent plus appropriées pour répondre à la demande des consommateurs. Les nouveaux OGM actuellement sur le marché sont essentiellement des variétés rendues tolérantes aux herbicides. En quoi l’utilisation d’herbicide est un pas vers la transition agro-écologique ? (...)
La lettre se termine par un vœu ou une demande. Les organisations soulignent : « Le conseil d’État doit encore statuer sur l’exclusion des variétés obtenues par mutagénèse traditionnelle du champ d’application de la réglementation sur les OGM en France. Nous espérons qu’il confirmera le statut réglementaire de produits que les consommateurs ont intégrés depuis longtemps dans leur quotidien ». La phrase est ambigüe pour plusieurs raisons. Certes le Conseil d’État peut proposer de maintenir l’exemption pour des produits issus des techniques traditionnelles de mutagénèse (développées avant 2001) et commercialisés depuis longtemps… mais il peut aussi décider de ne plus les exempter. La CJUE a en effet laissé la possibilité aux États membres de le faire. En revanche, les OGM issus des nouvelles techniques de mutagénèse doivent être réglementés comme tels, au même titre que les OGM transgéniques. Or de tels OGM sont actuellement cultivés sur le territoire européen de façon illégale, notamment le colza Clearfield ou des endives obtenues par fusion cellulaire avec le tournesol.