
Malgré la désillusion syrienne, Paris ne désarme pas. A peine digérée l’équipée malienne — il reste encore 2 800 militaires français dans ce pays — un autre objectif est en vue : la République centrafricaine (RCA), pays présenté par le président François Hollande, à la tribune des Nations unies le mois dernier, comme « en voie de somalisation ». Et à propos duquel les diplomates français ont réussi à faire adopter à l’unanimité jeudi soir, par le Conseil de sécurité, à New York, une résolution sur l’envoi de casques bleus.
Personne ne doute de la gravité de la situation en Centrafrique, où l’Etat est plus faible et absent que jamais. Pour Paris, la RCA peut devenir un autre foyer de désordre régional, voire une nouvelle Mecque du terrorisme, comme l’avait été le nord du Mali ou ce qu’est encore la Somalie. Ce qui n’était, pratiquement depuis l’accession du pays à l’indépendance en 1960, qu’instabilité chronique, a débouché ces derniers mois sur un dangereux chaos, sur fond de concurrence entre seigneurs de la guerre, d’incidents entre éleveurs et agriculteurs, voire d’affrontements à connotation religieuse, avec des centaines de victimes, un demi-million de personnes déplacées, etc. (...)
La rébellion au pouvoir a été officiellement dissoute, et ses quelque 15 000 ex-combattants, parmi lesquels une forte proportion d’étrangers (tchadiens, soudanais), doivent être désarmés — mais selon des modalités qui sont encore controversées. (...)
Pour la diplomatie française, le vote de jeudi soir est un peu un « lot de consolation ». Mais l’essentiel pour Paris est bien, cette fois, de ne pas se retrouver en pompier unique, et même si possible de ne pas apparaître comme le pompier en chef. Compte tenu des précédents libyen et malien, et du caractère cette fois plus sécuritaire que militaire de la situation en RCA, l’« africanisation » de l’opération s’impose. Ce qui permettrait à la France de jouer surtout un rôle de « catalyseur », plus confortable et moins exposé politiquement que lors de l’opération Serval au Mali.
Il s’agirait d’une intervention de type « rétablissement de la sécurité » qui vise avant tout à mettre fin à l’anarchie, et non — comme au Mali — à combattre un adversaire prêt à en découdre. Selon la résolution adoptée jeudi soir, le secrétaire général Ban Ki-moon a trente jours pour présenter un plan d’intervention des casques bleus. Une seconde résolution sera alors soumise au vote du Conseil de sécurité : il s’agira de donner le feu vert à cette opération qui sera régie par le « chapitre VII », autorisant le recours à la force.
Dans l’immédiat, l’ONU accorde son soutien politique aux forces des pays d’Afrique centrale déployées sous la bannière de l’Union africaine (...)