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On a trop de pétrole : si on essayait d’autres idées ?
 : Le blog de Nicolas Haeringer
Article mis en ligne le 24 septembre 2016

Maxime Combes et Nicolas Haeringer décryptent le dernier rapport du centre de recherche Oil Change International, publié jeudi 22 septembre. Et vulgarisent des données qui mettent en lumière l’obligation de sortir de l’ère des combustibles fossiles.

(...) Oil Change International fait partie de ses acteurs qui ont largement contribué à populariser la notion de "budget carbone" - autrement dit à faire le lien entre le réchauffement climatique et nos émissions cumulées de gaz à effet de serre. Ce lien permet en effet de calculer la quantité de gaz à effet de serre qui peut-être relâché dans l’atmosphère, d’ici à une date butoir (en l’occurrence 2050) si nous voulons préserver nos chances de maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2°C, voire au plus près des 1,5°C - comme le préconise l’article 2 de l’accord adopté l’an passé à l’issue de la COP21.

Cette quantité maximale de gaz à effet de serre que nous ne pouvons pas dépasser sous peine de renoncer à tenir cet objectif constitue notre "budget carbone". Cette notion n’a pas uniquement une vocation heuristique : elle devrait guider les politiques publiques de tous les États réellement déterminés à construire un futur préservé du chaos climatique.

Mis en relation avec les quantités de carbone que contiennent les réserves (les gisements actuellement exploités ou en passe de l’être) et les ressources (l’ensemble des gisements recensés) de combustibles fossiles, ce "budget carbone" nous permet en effet de déterminer ce qu’il est possible d’exploiter et ce qui doit impérativement rester dans le sous-sol.

Le rapport "the sky’s the limit" réactualise les précédents calculs en les affinant. Et la conclusion à en tirer est aussi claire que limpide : nous devons progressivement fermer les mines et autres gisements actuellement exploités. (...)

si nous exploitons l’ensemble des gisements actuellement exploités ou pour lesquels l’infrastructure extractive est déjà en place, nous sortirons irrémédiablement de la trajectoire d’un réchauffement limité à +2°C.

Pire : extraire les seuls gaz et pétrole des gisements actuellement exploités suffirait à nous projeter au-delà des 1,5°C. On imagine sans peine ce qu’il en serait si les entreprises charbonnières exploitaient de surcroît l’ensemble du minerai de charbon d’ores et déjà à portée de pioche comme d’excavatrice.

Tout responsable politique sensé en tirerait donc les conclusions suivantes :

aucune nouvelle infrastructure extractive ne doit être construite, pas plus que de nouveaux oléoducs, gazoducs, terminaux portuaires méthaniers, pétroliers ou charbonniers ne doivent être mis en service.
aucun gouvernement ne devrait plus accorder de permis (d’exploitation, bien sûr, mais aussi d’exploration)
de nombreuses mines, puits, champs, etc. devraient être fermés progressivement avant que l’exploitation de leurs réserves n’arrive à son terme, en particulier dans les pays les plus riches - et des transferts financiers importants doivent permettre aux pays les plus pauvres pour qu’ils développent les énergies renouvelables

Toute autre attitude reviendrait à nier les faits et les données consignés dans ce rapport, fruit des scénarios scientifiques d’évolution du climat.

À ce stade, cette sortie de l’ère des combustible fossile peut encore s’envisager de manière relativement progressive - mais plus nous repoussons le moment où nous l’engagerons réellement (plus nous attendons avant de fermer des mines, puits ou champs ; plus nous continuerons à accorder de nouveaux permis, etc.) plus la sortie qui s’imposera à nous sera brutale. Outre le risque climatique, ce qui est ici en jeu, c’est la capacité qu’ont les acteurs, privés comme publics, à anticiper un changement de modèle économique et financier - l’anticiper pour le préparer, l’absorber et éviter que le choc ne soit trop brutal (climatiquement, mais aussi économiquement et socialement). (...)

Les enjeux financiers sont en effet tels que jamais Total, BP, Exxon, Vattenfall, RWE et consors ne renonceront à leur magot. Ils sont toutefois, à certains égards, rassurant et libérateurs : l’énergie fossile apparaît ainsi pour ce qu’elle est. À savoir : une énergie extrêmement coûteuse, dangereuse pour la planète, pour nos droits et notre futur. (...)

les perspectives sont claires : tant que les États ne prendront pas leurs responsabilités, nous devons prendre les nôtres et faire barrage au charbon, au gaz et au pétrole*.

Nous avions déjà développé quelques pistes, autour du tryptique résistance, non-coopération et alternatives - le rapport d’Oil Change International renforce la nécessité d’une "désobéissance climatique ! (...)