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Pierre Larrouturou : "Même sans croissance, on peut réduire le taux de chômage"
Article mis en ligne le 4 octobre 2013

La résorption du chômage sans croissance ? La semaine de 4 jours ? C’est possible. L’économiste Pierre Larrouturou persiste et signe. Et ce spécialiste a presque toujours eu raison. Il fut notamment un des premiers à avoir annoncé la crise financière en 2008 et prévu la rechute en 2012. Membre du bureau national du PS, mais critique à l’égard de la politique de l’emploi du gouvernement, il milite avec Michel Rocard au sein du collectif Roosevelt 2012, une initiative citoyenne pour sortir de la crise.

(...) Le chômage augmente sans cesse. Le travail est-il un luxe ?

Disons que le partage de travail actuel est stupide : ou bien on ne travaille pas, ou bien on travaille trop. Les maladies liées à la surcharge et au stress se développent. Ceux qui travaillent ont souvent l’impression de travailler trop. En même temps, cinq millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi. Et c’est sans compter tous les jeunes qui galèrent et qui vivent encore chez leurs parents, ainsi que les plus de 55 ans pas encore inscrites. Nous sommes dans une situation dramatique. Et c’est encore pire dans les pays de l’Europe du Sud. (...)

même sans croissance, on peut éviter la récession et on peut financer autrement la dette publique. Je vous rappelle qu’on a mis autour de 1 % du PIB pour sauver les banques il y a quelques années. Tout le monde a trouvé ça normal. A mon avis, c’est une question de volonté politique. On peut y arriver, même sans changer les traités européens.

Comment ?

On peut relancer l’activité. Non en faisant des plans de relance tous azimut, mais en se demandant quel sont les besoins fondamentaux des gens. Nous savons qu’il faut une nouvelle politique du logement, par exemple. En France, il manque 800 000 logements. Et les loyers sont monstrueux. Actuellement, on ne fait rien, ou presque. Et le logement correspond à un besoin fondamental. Un chiffre pour se rendre compte de la gravité de la situation actuelle : si on avait le même de loyer qu’en Allemagne, on économiserait en moyenne 300 euros de loyer par mois pour une personne qui occupe 70 mètres carrés. (...)

Comment financer la construction des logements ?

Bonne nouvelle : on peut le faire sans augmenter les impôts ou la dette ! Il suffit de prendre les 34 milliards d’euros qui sont dans le Fonds de réserve des retraites. Actuellement cet argent est géré par BNP Paribas et Barclays et mis sur les marchés financiers. Les Hollandais ont fait un autre choix il y a deux décennies. Là-bas, les partenaires sociaux se sont dit qu’il valait mieux utiliser cet argent pour construire des logements que pour nourrir les marchés financiers. Aujourd’hui, plus de la moitié des logements qui existent aux Pays-Bas sont la propriété de coopératives rattachés à des syndicats. Il y a une grande mixité sociale et les loyers sont peu élevés car ils sont fixés par les syndicats et les coopératives. C’est rentable : plus de 2,5%. En France, le Fonds de réserve ne rapporte que 1,4 % par an.
Si on faisait ces investissements dans le logement, on créerait entre 250 000 et 300 000 emplois.

En luttant contre les effets du changement climatique, on pourrait aussi créer des emplois, non ?

Oui, le climat représente effectivement un vrai défi. Le nombre de sécheresses et d’inondations a été multiplié par 3 en 30 ans. Les dépenses d’énergie ont aussi triplé pour les particuliers. Nous proposons un pacte européen : que chaque pays donne l’équivalent de 1 % du PIB chaque année pour des travaux d’isolation. En France, on créerait ainsi 200 000 emplois et on ferait baisser les factures d’énergie. Un rapport de la Commission européenne montre qu’on économiserait 1000 euros par an et par famille en moyenne. (...)