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Pour les enfants migrants sans-abri, l’école est une chance malgré les difficultés
#enfants #ecole #migrants #hebergement
Article mis en ligne le 30 mars 2023

En France, la scolarisation des enfants est obligatoire quelque que soit leur situation administrative et celle de leurs parents. Des centaines d’enfants exilés sont ainsi scolarisés chaque année. Mais certains d’entre eux viennent en classe après avoir passé la nuit dehors, faute d’hébergement pour leur famille. Pour ces élèves, la scolarité est alors un parcours semé d’embûches autant qu’un îlot de stabilité. Avec la fin de la trêve hivernale, leur nombre pourrait augmenter.

La scolarité de Linda* a parfois pris des airs de course d’obstacles. Ces derniers mois, pour aller à l’école, la jeune fille a dû surmonter des difficultés aussi nombreuses qu’anormales dans la vie d’une adolescente. Arrivés d’Angola en France en 2019, Linda, 13 ans, sa sœur de 3 ans, son frère d’un an et demi et ses parents ont vécu à la rue. Aujourd’hui logée dans un foyer des Yvelines, la famille a connu les nuits sous tente ou dans des parkings, la peur d’être agressés, la faim, le manque d’hygiène.

Pour la jeune fille de 13 ans, à cette liste des horreurs du sans-abrisme se sont ajoutés les départs au collège le ventre vide, la fatigue qui empêche de suivre les cours, les moqueries des camarades et l’impossibilité de faire ses devoirs correctement dans une chambre d’hôtel sans connexion internet à plus d’une heure de transport du collège.

Pourtant Linda s’accroche. Pour cette jeune fille souriante aux cheveux coiffés en fines tresses, la scolarité est une priorité. (...)

C’était au début du collège, quand Linda et sa famille vivaient encore dans un CADA (centre d’accueil pour demandeurs d’asile) de Bordeaux, dans une relative stabilité, en attendant la réponse à leur demande d’asile. Quand la protection leur a été refusée, la famille a dû quitté le centre. Après quelques mois dans des squats, ils ont posé leurs valises à Paris, pensant qu’il y serait plus simple de trouver un hébergement.

Mais à leur arrivée, en septembre dernier, Linda et sa famille se sont retrouvés confrontés à un système totalement saturé. La famille appelle chaque jour le 115, en vain, et passe plus de trois mois à la rue. (...)

Plus de 1 600 enfants sans-abri

Linda fait partie des quelque 1 658 enfants et adolescents sans domicile fixe en France, selon le dernier baromètre établi par l’Unicef et la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS). Ce chiffre correspond au nombre d’enfants dont les familles ont appelé le 115 dans la nuit du 22 au 23 août 2022 sans obtenir de solution d’hébergement.

"Ces données ne sont pas exhaustives car nombreuses sont les familles sans-abri qui ne recourent pas au 115. De plus, elles ne permettent pas de mettre en lumière la situation spécifique des mineurs non accompagnés en situation de rue. Elles sont cependant révélatrices de l’ampleur d’une crise du logement et de l’hébergement qui perdure et dont les enfants sont des victimes collatérales", soulignait alors l’Unicef dans son communiqué.

Parmi ces enfants sans logement fixe, beaucoup sont des exilés dont les familles viennent d’arriver en France, ont été déboutées de l’asile ou bien encore sont sans-papiers. (...)

L’école protectrice

Hala Kerbage sait combien l’école est importante pour les enfants migrants. Cette pédopsychiatre qui exerce au centre hospitalier universitaire de Montpellier reçoit régulièrement en consultation des enfants arrivés en France avec leurs parents pour demander l’asile.

"Le fait d’être scolarisé est un facteur protecteur pour les enfants migrants. Ça l’aide à avoir des repères, une structure, à être dans une communauté et à avoir des amis. Il y a parfois des problèmes de langues si les enfants ne sont pas francophones ou d’intégration s’ils ont été déracinés de leur communauté. Mais, en général, la scolarité a toujours un effet positif sur l’enfant migrant", souligne la médecin.

Et pour ceux sans logement fixe, l’école représente un élément de stabilité et de continuité, indispensable au développement de l’enfant, plaide encore le Dr Kerbage.

Reste pour ces élèves la difficulté du rapport aux autres, pas toujours facile à gérer. Un élève différent peut vite être mis de côté. (...)

Les camarades de classe de Linda ne sont pas au courant de sa situation. L’adolescente trouve que c’est mieux ainsi mais angoisse qu’un jour ils découvrent son quotidien. "J’ai peur qu’ils me disent ‘Tu dors dehors, tu es une migrante’".

Entre les heures dans les transports et les déménagements à répétition, parfois l’adolescente perd le moral. (...)