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la quadrature du net
Pourquoi attaquer Apple ?
Article mis en ligne le 14 mai 2018

Le troisième monstre qu’on attaque, c’est Apple. Il est bien différent de ses deux frères déjà traités ici (Google et Facebook), car il ne centre pas ses profits sur l’exploitation de nos données personnelles. Ce géant-là est avant tout un géant de la communication, il sait donc bien se donner une image d’élève modèle alors qu’il n’est pas irréprochable... ni inattaquable !

Contre l’emprise des GAFAM sur nos vies, allez dès maintenant sur gafam.laquadrature.net signer les plaintes collectives que nous déposerons le 25 mai devant la CNIL.

L’entreprise Apple
Apple, c’est 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel et tout autant de réserve en trésorerie (pour comparer, le budget annuel de l’État français est d’environ 300 milliards). En bourse, l’ensemble des actions de l’entreprise vaudrait maintenant 1 000 milliards de dollars, ce qui en fait la première capitalisation boursière du monde.

Fondée en 1976, notamment par Steeve Jobs et bien avant l’avènement d’Internet, l’entreprise se centre sur la vente de ses propres ordinateurs, équipés de systèmes d’exploitation qu’elle développe elle-même.

En 1984, Apple annonce le lancement de son Macintosh au moyen d’une publicité vidéo réalisée par Ridley Scott, naïvement intitulée « 1984 » et posant l’entreprise en rempart contre une future société de surveillance (la vidéo originale est disponible sur YouTube, mais nous lui préférons le détournement qu’en ont fait nos amis de la Startuffe Nation !). Tout comme le slogan interne de Google, « Don’t be evil », la posture prise en 1984 par Apple n’est finalement qu’une sinistre anti-prophétie : l’entreprise jouera bien un rôle décisif dans la transformation des outils numériques en moyens d’enfermement et de contrôle.

Par la suite, Apple ne cessera d’ailleurs pas de briller par ses stratégies de communication aussi confuses qu’insidieuses : sa fameuse injonction « Think different » ne nous disant surtout pas « de quoi » il s’agirait penser différemment, elle nous demande surtout, en vérité, de penser différemment « de nous-même » (de notre singularité) pour « penser Apple » et nous fondre dans un « cool » finalement très commun. (...)

l’entreprise entend garder tout contrôle sur l’utilisation que ses clients peuvent faire des produits qu’ils ont achetés.

Les systèmes d’exploitation livrés avec les machines Apple - iOS et Mac OS - sont ainsi de pures boites noires : leur code source est gardé secret, empêchant qu’on puisse prendre connaissance de leur fonctionnement pour l’adapter à nos besoins, en dehors du contrôle d’Apple.

Son App Store est aussi une parfaite illustration de cette prison dorée : Apple limite les logiciels téléchargeables selon ses propres critères, s’assurant que ses utilisateurs n’aient accès qu’à des services tiers « de qualité » - conformes à son modèle économique et à sa stratégie d’enfermement (Apple prenant au passage 30% du prix de vente des applications payantes, il a d’ailleurs tout intérêt à favoriser celles-ci).

Enfin, une fois que ses utilisateurs ont payé pour utiliser divers logiciels non-libres via l’App Store, il devient bien difficile pour eux, économiquement, de se tourner vers d’autres systèmes qu’Apple, où l’accès à certains de ces logiciels ne serait plus possible - et où l’argent dépensé pour les acheter serait perdu.

L’emprisonnement est parfait.

Un enfermement (aussi) matériel
Hélas, le modèle d’enfermement d’Apple ne se limite pas aux logiciels : la connectique des iPhones n’est pas compatible avec le standard Micro-USB utilisé par tous les autres constructeurs, obligeant ainsi à acheter des câbles spécifiques. De même, les derniers iPhones n’ont pas de prise jack pour le casque audio, obligeant à acheter un adaptateur supplémentaire si on ne souhaite pas utiliser les écouteurs Bluetooth d’Apple.

La dernière caricature en date de ce modèle est la nouvelle enceinte d’Apple, HomePod, qui requiert un iPhone pour s’installer et ne peut jouer que de la musique principalement fournie par les services d’Apple (iTunes, Apple Music...).

Enfin, une fois qu’Apple peut entièrement contrôler l’utilisation de ses appareils, la route lui est grande ouverte pour en programmer l’obsolescence et pousser à l’achat d’appareils plus récents. (...)

Une définition « hors-loi » des données personnelles
Dans son « engagement de confidentialité », qu’on est obligé d’accepter pour utiliser ses services, Apple s’autorise à utiliser nos données personnelles dans certains cas limités, se donnant l’image d’un entreprise respectueuse de ses utilisateurs.

Pourtant, aussitôt, Apple s’autorise à « collecter, utiliser, transférer et divulguer des données non-personnelles à quelque fin que ce soit », incluant parmi ces données :

« le métier, la langue, le code postal, l’indicatif régional, l’identifiant unique de l’appareil, l’URL de référence » ;
« la localisation et le fuseau horaire dans lesquels un produit Apple est utilisé » ;
l’utilisation des services Apple, « y compris les recherches que vous effectuez », ces informations n’étant pas associées à l’adresse IP de l’utilisateur, « sauf dans de très rares cas pour assurer la qualité de nos services en ligne ».
Cette liste révèle que la définition des « données personnelles » retenue par Apple est bien différente de celle retenue par le droit européen. (...)

Le méga-cookie Apple

En dehors de l’immense incertitude quant aux pouvoirs qu’Apple s’arroge via sa définition erronée des « données non-personnelles », un danger est déjà parfaitement actuel : l’identifiant publicitaire unique qu’Apple fournit à chaque application.

Comme nous l’avions déjà vu pour Google (le fonctionnement est identique), Apple associe à chaque appareil un identifiant unique à fins publicitaires. Cet identifiant est librement accessible par chaque application installée (l’utilisateur n’est pas invité à en autoriser l’accès au cas par cas - l’accès est automatiquement donné).

Cet identifiant, encore plus efficace qu’un simple « cookie », permet d’individualiser chaque utilisateur et, ainsi, de retracer parfaitement ses activités sur l’ensemble de ses applications. Apple fournit donc à des entreprises tierces un outil décisif pour établir le profil de chaque utilisateur - pour sonder notre esprit afin de mieux nous manipuler, de nous soumettre la bonne publicité au bon moment (exactement de la même façon que nous le décrivions au sujet de Facebook).

On comprend facilement l’intérêt qu’en tire Apple : attirer sur ses plateformes le plus grand nombre d’applications, afin que celles-ci attirent le plus grand nombre d’utilisateurs, qui se retrouveront enfermés dans le système Apple. (...)