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Observatoire des Inégalités
Pourquoi la gauche doit augmenter les impôts
Article mis en ligne le 31 mars 2013
dernière modification le 28 mars 2013

Après avoir réduit les impôt au profit des plus aisés, la France se lance dans une suicidaire baisse des dépenses, qui pénalise les couches populaires et moyennes. L’alternative est un effort fiscal national. Le point de vue de Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités. Article publié par Le Monde du 28 mars 2013.

Converti à la baisse des impôts à la fin des années 1990, le Parti socialiste défend désormais la baisse des dépenses. Les catégories populaires et moyennes vont payer l’addition des cadeaux fiscaux qui, depuis 2000, ont bénéficié aux plus aisés. Le refus du président de la République d’honorer sa promesse d’une réforme fiscale et d’augmenter les impôts [1] a des conséquences désastreuses, alors que notre pays s’enfonce dans la crise.

Il ne faut pas se méprendre. La nécessité de réduire les déficits n’est plus discutable, compte tenu de l’état des comptes publics. L’endettement finance de moins en moins des investissements pour les générations à venir, et de plus en plus les dépenses du quotidien. Les charges d’intérêt représentent les deux tiers du budget de l’éducation nationale. Elles enrichissent les plus riches, ceux qui ont les moyens d’épargner et de prêter à la collectivité. Economiser l’argent public est un impératif, quelle que soit la situation économique.

Chaque fonctionnaire doit avoir conscience que sa paie est aussi financée par les plus pauvres, quand ils font leurs courses par exemple. On peut réaliser des économies en supprimant des services inutiles. Enfin, soyons réalistes : la majorité précédente a gouverné dix ans et a déjà fait une grande partie des économies possibles. Le fameux train de vie de l’Etat et des collectivités a déjà été ponctionné. La dépense publique, ce sont des services publics bien concrets et pas seulement les salaires des ministres : ceux qui veulent couper à tout-va doivent dire ce qu’ils veulent supprimer, au lieu de rester dans le vague. Souhaitent-ils moins de sécurité, d’enseignement, de soins, de retraites, de justice ? Alors que le nombre de demandeurs d’emploi atteint des records, va-t-on s’attaquer aux plus faibles ? (...)

La France est parmi les pays où les dépenses publiques sont, nous dit-on, au plus haut. Mais la comparaison est un non-sens. Cette situation est due aux dépenses de protection sociale en matière de santé et de retraites, moins souvent qu’ailleurs confiées aux assureurs ou aux banquiers et donc comptabilisées comme publiques... Quelle différence pour le citoyen ? La France se situe dans la moyenne si l’on considère les dépenses de l’Etat et des collectivités locales...

La seule alternative aux coupes dans les dépenses est la hausse des impôts. Economiquement, c’est indispensable, et il est socialement juste que les contribuables - sauf les plus modestes - participent au redressement du pays en fonction de leurs "capacités contributives", comme le veut notre Constitution.

"Oui, mais alors, nous dit-on, vous allez freiner l’activité." Une hausse d’impôt a-t-elle un impact plus grand qu’une baisse de dépense ? Les coupes actuelles nous enfoncent autant dans la récession... Les baisses d’impôts ont nourri l’épargne, c’est aussi l’épargne qui financera les hausses de taxes. L’argent public n’est pas englouti dans un trou noir économique, mais injecté dans un circuit. Contrairement aux gains procurés par une baisse de l’impôt sur la fortune, une augmentation du RSA repart intégralement en activité pour les commerçants du quartier... Comment vivraient les médecins sans remboursements de soins ? Les entrepreneurs de travaux publics sans commande publique ? Une grande partie des secteurs fonctionnent grâce à l’argent de la collectivité.

Drogués aux sondages, l’Elysée et Matignon sont pétrifiés à l’idée d’un effort national.