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Précarité, chute des revenus… : en colère, les livreurs Deliveroo manifestent à Paris
Article mis en ligne le 21 octobre 2018

De 5,75 euros la course à 4,80 euros en octobre, les revenus des coursiers Deliveroo ne cessent de diminuer. Les livreurs veulent avoir leur mot à dire dans les discussions autour de leurs « contrats de travail » à l’ère de l’ubérisation.

Deliveroo réévalue chaque mois ce montant, auquel s’ajoute une rémunération liée à la distance parcourue. Forcément, les travailleurs entendent endiguer cette plongée de leurs revenus.(...)

Une trentaine de collaborateurs de l’entreprise anglaise sont réunis en dessous du monument, place de la République. Ils arborent leur tenue de travail turquoise, et se tiennent debout, pied sur la pédale pour certains.

« On a tous la même boîte, le même salaire, le même type de contrat, alors c’est normal qu’on revendique ensemble », justifie Steven, emmitouflé dans son imper, casquette vissée sur la tête. Les cyclistes présents aujourd’hui entendent faire valoir leurs droits comme groupe. « Nous revendiquons l’impossibilité de changer les contrats sans l’accord collectif des livreurs », réclame leur tract.(...)

Ce n’est pas la première fois que les autoentrepreneurs se réunissent, loin de là. Ils s’étaient déjà fédérés à l’été 2017 , lorsque la plateforme avait décidé de changer sa rémunération à taux horaire, pour un modèle à la course. De 7,50 € de l’heure avec un supplément par course, ils étaient passés à 5,75 € par course. Depuis, ce montant ne cesse de diminuer.

« Je travaille ce qu’il faut pour payer mon loyer à 450 €. En moyenne, il me faut 20 heures par semaine », détaille Steven, étudiant par ailleurs. Si le prix des courses baisse trop, le temps passé à vélo pourrait empiéter sur ses cours.

Indépendants ou salariés ?
En mars 2018, l’inspection du travail s’est penchée sur le statut des coursiers Deliveroo. Elle souhaitait prouver que les livreurs sont traités comme des salariés classiques, sans les nombreux avantages. En statut d’autoentrepreneur, les travailleurs doivent cotiser au RSI, la sécurité sociale des indépendants, à hauteur de 25 % de leurs revenus. Pour l’entreprise, c’est une grande dépense en moins, tout comme l’absence de congés payés ou de paiement des frais de fonctionnement — comme le vélo. En conséquence, le montant net touché par le livreur s’éloigne des 5 euros que Deliveroo lui paye en facture.(...)

Sur le planning, c’est premier arrivé, premier servi. L’agenda s’ouvre par vague, toutes les deux heures, et l’ordre de passage des travailleurs est déterminé par un algorithme.

POUR AVOIR ASSEZ D’HEURES LA SEMAINE SUIVANTE, IL FAUT TRAVAILLER DE 20H À 22H LE WEEK-END.(...)

Comme souvent, les manifestants ont tenté d’entrer dans les bureaux de Deliveroo. Et ils n’y sont pas parvenus. L’entreprise garde ses distances avec les travailleurs indépendants qu’elle embauche. Depuis sa signature de contrat, Bruno n’a plus jamais mis les pieds dans les bureaux (...)

Tout problème que rencontre un livreur est géré à distance, par téléphone ou par mail.

Si la presse donne de l’écho au mouvement social, Deliveroo se défend de devoir répondre à la contestation. Menée par quelques dizaines de travailleurs, elle n’attire pour l’instant qu’une infime partie des 10 000 livreurs inscrits… et c’est précisément un problème qui commence à être évoqué : le modèle de travail proposé par l’entreprise empêche la contestation. En effet, plus il y aura de livreurs, moins ils se connaîtront et moins l’absence de quelques-uns aura un impact.