
Aujourd’hui à partir de 14h30, le Sénat débute l’examen du projet de loi Terrorisme de Bernard Cazeneuve. Après le dépôt des amendements par les parlementaires et le gouvernement, La Quadrature du Net - qui s’oppose depuis plusieurs mois à ce projet de loi - engage les sénateurs à étudier ou soutenir les amendements intéressants pour améliorer les dispositions toujours dangereuses du projet de loi.
Le projet de loi de lutte contre le terrorisme présenté par le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a été adopté à l’Assemblée nationale au mois de septembre, après des débats consternants montrant à quel point les députés font peu de cas des libertés fondamentales, n’hésitant pas à voter une loi d’affichage inefficace et liberticide dans l’espoir de répondre aux actualités dramatiques du Moyen-Orient. Le Sénat, chargé de poursuivre l’examen législatif aujourd’hui, doit absolument revenir sur les dispositions les plus dangereuses de ce projet de loi et rétablir l’équilibre fondamental entre libertés publiques et invocation sécuritaire. Les quelques amendements allant dans ce sens sont à soutenir. L’examen en procédure accélérée de ce projet de loi, avec une seule lecture par chaque Chambre, exige une prise de position forte des sénateurs.
Article 4
L’article 4 tel que proposé par l’Assemblée Nationale porte sur le transfert, du droit de la presse vers le code pénal, des infractions de provocation et apologie des actes de terrorisme.
Comme La Quadrature du Net le soulignait la semaine dernière, intégrer ces dispositions dans le code pénal affaiblirait les garanties procédurales qui protègent la liberté d’expression.
Dans son texte du 14 octobre 2014, la commission des lois siégeant au Sénat revient sur les dangers effectifs d’une telle disposition et s’oppose, par le biais de l’amendement 18, à l’idée d’extraire ces deux délits du droit de la presse.
Malheureusement, les sénateurs ne sont pas allés jusqu’au bout de leur raisonnement et ont créé une exception pour les délits de provocation et apologie commis sur Internet, ce qui remet en cause le principe d’égalité devant la loi pénale, établi au considérant 65 de la décision n° 2006-540 DC du Conseil Constitutionnel.
La suppression de l’article reste dès lors la solution la plus logique (...)
Article 5
L’article 5, tel que proposé par l’Assemblée, étend à la situation d’une préparation individuelle des dispositions qui aujourd’hui portent sur la participation à un groupement constitué en vue de commettre un acte de terrorisme (cf. article 421-2-1 du code pénal).
Il introduit le délit d’entreprise individuelle de terrorisme ayant vocation à criminaliser et pénaliser l’intention et non pas la commission ou la préparation elles-mêmes d’un acte de terrorisme.
Les amendements déposés en vue de l’élaboration du texte de la commission des lois n’ont fait que détailler ultérieurement les éléments matériels1 utiles à la définition d’entreprise terroriste individuelle, sans aucune prise en compte de la conformité de cette introduction au principe de légalité, inscrit à l’article 8 de la déclaration de 1789, et de présomption d’innocence inscrit à l’article 9 de la même déclaration.
La Quadrature du Net appelle ainsi au soutien de l’amendement 62 qui prend en compte les éléments y étant évoqués et propose la solution la plus adaptée à ce cadre, à savoir la suppression de l’article. (...)
« Les sénateurs ont l’opportunité de supprimer ou d’améliorer les pires dispositions de ce projet de loi. Il est de leur devoir de s’en saisir, malgré l’inconfort d’une procédure accélérée survenant en plein renouvellement de la Chambre. Les citoyens doivent pouvoir compter sur les sénateurs pour revenir à un meilleur équilibre entre libertés fondamentales et lutte contre le terrorisme, sous peine de voir la fuite en avant du gouvernement se poursuivre encore et encore dans des lois d’affichage et de communication inefficaces et liberticides » appelle Miriam Artino, coordinatrice de l’analyse juridique et politique de La Quadrature du Net