Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Acrimed
Que s’est-il passé place de la République (2) ? Informations désinformées sur le « saccage » du « mémorial »
Article mis en ligne le 8 décembre 2015

Dans un précédent article consacré aux « informations désinformées des journaux télévisés », nous posions déjà cette question : « Que s’est-il exactement passé le dimanche 29 novembre 2015 sur la Place de la République à Paris ? » Et nous indiquions : « Pour que l’on puisse s’en remettre aux médias, encore faudrait-il qu’ils disposent des moyens d’observer, d’enquêter de recouper des témoignages, au lieu de s’en remettre à une vision étroitement policière quand ce n’est pas, tout simplement, à la version de la Police. »

Or un examen plus détaillé de la fabrication de l’information permet de relever des manquements consternants, mais très significatifs : voilà qui mérite que l’on revienne en détail sur les informations désinformées diffusées par les grands médias, à commencer celles concernant le « saccage » du « mémorial ». (...)

Ainsi, selon France 2 [1], ces « casseurs » ont « en partie détruit le mémorial dédié aux victimes des attentats en jetant des bougies, des pots de fleur » sur les CRS. Pour TF1 [2], « le mausolée en hommage aux victimes des attentats est saccagé ; pots de fleur et bougies servent de projectiles ». Pour RFI [3], « lors de ces heurts, des manifestants ont lancé des chaussures et des bougies, pris à même le sol sur le lieu de mémorial pour les victimes des attentats commis en janvier et novembre. » Et la plupart des médias, reprenant ces informations, se font l’écho de réactions de passants : « révoltant », « indécent », « inadmissible ».

Sur le site de BFM, de Ouest-France, de La Dépêche ou encore de L’Express, on retrouve les mêmes témoignages de passants (...)

La plupart des grands médias ont mis en opposition les actions « non-violentes » du matin et le « saccage » du « mémorial » des victimes des attentats. D’un côté, il y a donc les actions symboliques, et notamment le dépôt de plusieurs milliers de chaussures, par Avaaz, sur la place de la République, geste dont la dignité est louée, quand il n’est pas placé dans une continuité tacite des commémorations des attentats. D’un autre côté, les dégâts de l’après-midi qui sont l’expression d’un « non respect de la mémoire des victimes » selon les paroles de Bernard Cazeneuve qui sont reprises en boucle, sur les chaînes de télévision, les stations de radio et les sites internet (...)

Qui plus est, les médias ont utilisé de manière interchangeable les expressions « manifestation interdites suite aux attentats » et « manifestation interdite suite à l’état d’urgence », comme s’il s’agissait de synonymes ou que le lien de cause à effet était évident et tombait sous le sens, au lieu de s’interroger sur les conséquences de l’état d’urgence en termes de droits et de libertés démocratiques. (...)

Non seulement l’information n’a été que partielle, mais elle a de plus été, de toute évidence, partiale. En effet, s’il est vérifié que des manifestants ont contribué au dit « saccage », il est non moins vérifiable que les forces de police y ont largement participé [4]. Mais, comme nous l’avions indiqué à propos des JT de France 2 et de TF1, seule la version ajustée à celle de la Préfecture de police, voire inspirée par elle, a, dans un premier temps, été relayée. (...)

Dans ces conditions, on est en droit de s’interroger sur le rôle des « grands « médias comparé à d’autres sources d’information… (...)

Plus éloquente encore, une vidéo qui - titrée ironiquement « Des individus violents en marge de la COP 21 » ne dissimule pas son parti-pris. Publiée sur Facebook, elle montre distinctement que les forces de police ont profané le mémorial, comme le montrent également les images de cette autre vidéo également publié sur Facebook, ou encore cette vidéo de Stéphane Trouille, journaliste, documentariste indépendant, qui montre elle aussi l’intervention policière sur le mémorial (premières secondes), ainsi que des « violences » peu traitées par les grands médias [12] : (...)

Quant à la « chaîne humaine » destinée à protéger le mémorial, des dégâts, il semble bien, au regard des vidéos, des photos et des différents témoignages, qu’il ne s’est pas tant agi de le protéger des « casseurs » que des… CRS, qui finiront par évacuer violemment certains des militants ayant protégé le mémorial. Version appuyée par exemple par ce témoignage publié sur Basta !
(...)

Une pensée pour Eugénie Bastié du Figaro qui expliquait, souvenons-nous, que « plusieurs personnes parviennent à former une chaîne humaine autour du mémorial pour protéger les fleurs et les bougies, bientôt rejointes par les CRS ». « Rejointes » ? Il fallait l’oser… (...)

On notera en outre que certains sites, notamment ceux de Libération et du Monde ont, un peu plus de 24 heures après les « événements », admis à demi-mots que les premières informations étaient, sinon erronées, du moins discutables (...)