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Qui a un permis de tuer ?
Article mis en ligne le 13 août 2016

Le 10 septembre 2012, Jacqueline Sauvage est enfermée dans sa chambre. Son mari force la porte et la tabasse, lui éclatant la lèvre inférieure. Elle prend un fusil et lui tire dans le dos par trois fois, avant d’appeler le 18 et de se dénoncer à la police : « Venez vite, j’ai tué mon mari ». Condamnée à 10 ans de prison, elle a bénéficié, suite à une très large campagne de soutien, d’une grâce partielle du Président François Hollande. Ce matin (12 août), le tribunal d’application des peines de Melun a pourtant rejeté sa demande de libération conditionnelle.

Et ce au motif que Jacqueline Sauvage n’aurait pu mener une « authentique démarche de réflexion », susceptible de lui permettre de « s’interroger sur sa part de responsabilité dans le fonctionnement pathologique de son couple ». Devant un déni aussi monstrueux des violences faites aux femmes, nous republions ce texte, écrit aux lendemains de la condamnation de Jacqueline Sauvage, en appelant à une nouvelle mobilisation.

Comme le révèle le procès, pendant 47 ans, celui avec qui elle partageait sa vie l’a violée, battue, a terrorisé ses enfants, abusé sexuellement de ses filles, et frappé régulièrement son fils qui a fini par se pendre le matin du jour où sa mère à tiré. Le jeudi 4 décembre, la Cour d’Appel de Blois a pourtant confirmé la condamnation de Jacqueline Sauvage à dix ans d’emprisonnement pour le meurtre de son mari.

Quelques jours avant, le 25 novembre [1], une statistique de la Banque Mondiale passait inaperçue : le viol et la violence conjugale représentent un risque plus grand pour les femmes de 15 à 44 ans que le cancer, les accidents de la route, la guerre et le paludisme réunis [2].

Cela peut paraître incroyable mais le premier risque pour les femmes, au niveau mondial, provient des personnes de leur entourage, et plus terrible encore, des hommes dont elles sont les plus proches, leurs conjoints. Pourtant très peu de femmes portent plainte : en France, seulement 16% d’entre elles le font [3].Ce qui veut dire que 84% des conjoints violents ne sont pas inquiétés.

Face à une telle impunité, il est du devoir de la société de protéger les personnes dont la vie est menacée. Depuis le début de l’année, les violences conjugales ont fait presque autant de victimes que le terrorisme en France -130 femmes sont mortes- sans qu’aucune mesure nouvelle ne soit prise pour que cela ne se reproduise pas l’année prochaine.

La peine infligée à Jacqueline Sauvage "ne doit pas être un permis de tuer", a lancé l’avocat général Frédéric Chevallier lors des plaidoiries pour convaincre les jurés de maintenir la condamnation. Si elle ne s’était pas défendue, peut-être que Jacqueline Sauvage en serait morte. On aurait ajouté son décès à la liste des femmes assassinées par leurs conjoints qui se répète chaque année sans que rien ne change. (...)