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Roland Rappaport, avocat de toute l’humanité
Article mis en ligne le 2 juillet 2017

L’avocat Roland Rappaport est décédé lundi 26 juin, à 83 ans. Ami de Mediapart dès l’origine, il fut le combattant émérite d’une justice sans frontières, refusant de hiérarchiser entre les atteintes à l’humanité. De la torture pendant la guerre d’Algérie à la déportation des enfants juifs d’Izieu en passant par la persécution des dissidents soviétiques, il n’aura manqué aucun des rendez-vous de la liberté.

Roland Rappaport est mort comme il a vécu : en inlassable activiste de la justice, en inépuisable militant du droit. Lundi 26 juin au matin, il se rendait avec son épouse, Lydie, pour un hommage à la dame d’Izieu, Sabine Zlatin, qui avait été sa cliente lors du procès du SS Klaus Barbie. Le nom de Sabine Zlatin devait être donné, l’après-midi de ce lundi, à un collège de Belley, dans l’Ain, et maître Rappaport n’aurait pour rien au monde manqué ce rendez-vous avec sa propre vie, ses engagements, ses fidélités. Il est décédé brutalement, en s’effondrant gare de Lyon, sur le chemin menant au train qu’il devait emprunter. Né le 21 septembre 1933, il allait sur ses 84 ans.

Roland Rappaport fut l’un des principaux artisans de la Maison d’Izieu, dont l’existence maintient vivant le souvenir des quarante-quatre enfants juifs qui avaient trouvé refuge dans cette petite commune de l’Ain grâce à Sabine Zlatin et qui, arrêtés le 6 avril 1944, furent immédiatement déportés. Tous furent exterminés. Or, lors du procès Barbie en 1987, avocat de Sabine Zlatin, partie civile, Me Rappaport se distingua de nombre de ses confrères, voire de l’accusation elle-même. Revendiquant un humanisme sans frontières, enraciné dans une conscience internationaliste aiguë, il refusa de limiter le crime contre l’humanité à l’extermination des seuls juifs, l’étendant à tous les déportés victimes de la machinerie de mort nazie. (...)

Dans les derniers jours de sa vie brutalement interrompue, Roland Rappaport écrivait ses mémoires et, sur l’insistance de Lydie, avait accepté de coucher sur le papier des souvenirs plus intimes. D’emblée, il y revendique son héritage de juif athée et universaliste, évoquant son père venu de Pologne en France dans les années 1920, pour y poursuivre ses études, parce que l’antisémitisme polonais lui fermait la porte de l’enseignement supérieur. Lorsque son père est mort en 1968, il demanda à sa mère si elle souhaitait la présence d’un rabbin. Sa réponse catégorique – « Il n’y a jamais eu de rabbin chez nous, il n’y en aura pas aujourd’hui » – n’empêcha pas ses parents de choisir d’être enterrés avec l’étoile de David, dans le quartier juif du cimetière de Bagneux. (...)