
Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire visant l’association SOS Chrétiens d’Orient. Les gendarmes s’intéressent notamment à ses liens avec des milices syriennes accusées de crimes de guerre.
« Délirantes » : c’est ainsi que SOS Chrétiens d’Orient qualifiait les accusations de complicité de crimes de guerre à son encontre, en 2020, lors de la publication de notre enquête sur cette association. C’est pourtant cette publication, exposant le soutien de SOS Chrétiens d’Orient au régime de Bachar al-Assad et à ses milices, qui a poussé le parquet de Paris à ouvrir une enquête préliminaire pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, a appris Mediapart. (...)
Dans notre dossier, nous révélions en effet que certains des partenaires syriens de l’association, à la tête de milices pro-Assad, étaient accusés par des ONG syriennes d’avoir pillé des villages, bombardé des civils et entraîné des enfants au combat. Ils « se contentent de se défendre eux et leurs familles contre l’État islamique et Al-Qaïda », avait répondu à Mediapart le service communication de l’association.
L’enquête a été confiée à l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité et les crimes de haine (OCLCH) (voir Boîte noire). Ce service interministériel rattaché à la gendarmerie nationale a été créé en 2013. Il est chargé, entre autres, d’enquêter sur les criminels de guerre présumés présents sur le territoire national. Après avoir poursuivi un vendeur d’armes chimiques franco-syrien ou encore un complice des génocidaires du Rwanda, les gendarmes se penchent donc pour la première fois sur les activités d’une association française, laquelle, comme ses membres et dirigeants, est présumée innocente.
Au centre de l’enquête figurent deux chefs de milices chrétiennes, partisanes de Bachar al-Assad, Simon al-Wakil et Nabel al-Abdullah. (...)
Dans la galaxie Zemmour
L’association entretient toujours des liens étroits avec ces miliciens, en particulier à Mhardeh. À l’automne 2021, le directeur général de SOS Chrétiens d’Orient, Benjamin Blanchard s’affichait à nouveau aux côtés du commandant Simon al-Wakil et l’association se vantait de reconstruire la maison d’un ex-combattant qui était « sous les ordres du célèbre “Monsieur Simon ” face aux groupes armés terroristes ». (...)
En France, SOS Chrétiens d’Orient s’ancre à l’extrême droite depuis sa création en 2013 par des militants de la Manif pour tous, bien qu’elle se présente officiellement comme « apolitique ». Son président, Charles de Meyer, est l’actuel assistant parlementaire de Thierry Mariani, eurodéputé du Rassemblement national. Le directeur, Benjamin Blanchard, a aussi été assistant parlementaire du Front national et est toujours animateur vedette de Radio Courtoisie, classée à l’extrême droite.
Au conseil d’administration de l’association, on trouve la chroniqueuse Charlotte d’Ornellas qui officie à Valeurs actuelles et sur les plateaux de la chaîne CNews - qui employait Zemmour jusqu’en septembre 2021. En 2016, elle était venue en personne prendre la pose avec les miliciens de Mhardeh, en compagnie de Benjamin Blanchard et de l’ex-chef de mission en Syrie, Alexandre Goodarzy, comme l’avait raconté L’Express. (...)
Deux mois avant ses diatribes islamophobes, Éric Zemmour avait aidé à récolter 20 000 euros lors d’une vente aux enchères de SOS Chrétiens d’Orient « au profit de la ville de Mhardeh en Syrie » - sans que l’identité exacte des bénéficiaires ne soit communiquée - organisée à Cogolin par le maire Marc-Étienne Lansade. Cet ancien élu du Rassemblement national a depuis rejoint le premier cercle des zemmouriens - il était « invité VIP » au meeting à Villepinte.
D’anciens bénévoles ont aussi rejoint Génération Z, les petites mains qui organisent la campagne d’Éric Zemmour. (...)