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la Quadrature du Net
Sale (prin)temps pour les libertés
communiqué du Syndicat de la magistrature, du Syndicat des Avocats de France, de La Quadrature du Net, du Cecil et de Creis-Terminal, membres de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN).
Article mis en ligne le 28 mai 2016

Une troisième prorogation de l’état d’urgence a été adoptée le 19 mai sans vrai débat, comme par fatalisme, au nom de la sécurisation de l’Euro de football et du Tour de France. Parallèlement, la loi sur la réforme pénale et la lutte antiterroriste votée en mai introduit dans le droit de nombreuses prérogatives de l’état d’urgence, installant les principes de l’état d’urgence permanent et de la régression des droits.

L’expérience d’un semestre sous cet état d’exception aurait dû finir de convaincre les élus que l’état d’urgence est tout aussi inutile à la lutte contre le terrorisme – qui nécessite en réalité de minutieuses enquêtes judiciaires sur ces réseaux criminels – que dangereux pour les libertés. Les chiffres parlent pourtant d’eux-mêmes : fondées sur des vagues suspicions, et des dénonciations conduisant à confondre pratiques religieuses strictes et action criminelle, les perquisitions et les assignations ordonnées en nombre – près de 4 000 pour les perquisitions - n’ont accouché que de six enquêtes proprement anti-terroristes. Signe du danger que fait peser l’état d’urgence sur nos libertés, les perquisitions informatiques ont été censurées par le conseil constitutionnel, sans pour autant que l’ensemble de l’édifice juridique de l’état d’urgence ne soit remis en cause profondément par des parlementaires mis sous pression par le gouvernement au nom du risque terroriste.

Stigmatisant nos concitoyens musulmans d’un côté, ces outils servent de l’autre à museler les expressions politiques, de la COP 21 à la mobilisation contre le projet de loi de travail, par des interdictions de manifestations, des assignations à résidence ou des interdictions de paraître à l’encontre de militants. Les – de moins en moins – rares annulations contentieuses ne suffisent pas à garantir nos libertés, ne serait-ce que parce qu’elles interviennent après coup. Ce dont notre démocratie a besoin, c’est de la levée de l’état d’urgence.

Présentée par le gouvernement de Manuel Valls comme une condition de sortie de l’état d’urgence, la loi de réforme pénale et contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement vient d’être adoptée au Parlement. L’apnée sécuritaire se poursuit. (...)

La persistance paye : la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, la surveillance et la fouille systématique des personnes détenues, l’intégration de l’administration pénitentiaire dans la communauté du renseignement aux pouvoirs exorbitants et la création du délit de consultation habituelle de sites faisant l’apologie du terrorisme ont finalement été votés. Repoussées pour certaines à de nombreuses reprises, ces dispositions nourrissent un arsenal antiterroriste qui inquiète jusqu’aux autorités onusiennes. Des alertes majeures et répétées que le gouvernement s’obstine à ignorer.

L’espace numérique continue à être l’objet d’atteintes aux droits fondamentaux (...)