
(...) Nous soussignées, les organisations internationales et régionales, écrivons à l’occasion du 26ème anniversaire de la Conférence de paix de Paris sur le Cambodge, coprésidée par la France et l’Indonésie. La Conférence de Paris a conduit à la signature des Accords de Paix de Paris qui avaient pour objectif de mettre fin au « conflit tragique et sanglant » au Cambodge. Vingt-six ans plus tard, il y a un besoin urgent pour la communauté internationale de prendre des actions décisives et d’assurer que la vision démocratique du Cambodge, définie par les Accords de Paris, ne soit pas totalement abandonnée.
Les Accords de Paix de Paris ont créé des obligations légales claires pour les signataires, y compris l’obligation de consulter les membres de la Conférence de Paris en cas de violation de ces accords.[1] Ces obligations existent encore aujourd’hui malgré les récents propos du Premier Ministre cambodgien Hun Sen comparant les Accords de Paris à un fantôme.[2]
Nous soumettons respectueusement que vos obligations à prendre des mesures concrètes, découlant de ces accords, ont été déclenchées par la grave détérioration de la situation des droits de l’homme et de la démocratie au Cambodge ces dernières semaines et derniers mois. Cette détérioration a conduit à de claires violations des Accords de Paris. En particulier, l’article 29 de l’Accord pour un règlement politique global du conflit du Cambodge (ARPG) stipule :
« Sans préjudice des prérogatives du Conseil de sécurité des Nations Unies, et sur demande du Secrétaire général, les deux coprésidents de la Conférence de Paris sur le Cambodge, dans l’éventualité d’une violation ou d’une menace de violation du présent Accord, engageront immédiatement les consultations nécessaires, y compris avec les membres de la Conférence, en vue de prendre les dispositions appropriées pour assurer le respect de ces engagements. »
Depuis le mois de juillet 2017, le Gouvernement Royal du Cambodge (GRC) s’est lancé dans une oppression sévère à l’encontre de l’opposition politique, des organisations de la société civile, des médias critiques ainsi que des individus qui exercent leurs libertés fondamentales. La sévérité de cette oppression est sans précédent dans l’ère post-1991, le Cambodge faisant face à une véritable menace pour sa démocratie. (...)
En plus de l’atteinte au droit à la participation politique et l’élimination d’une véritable opposition politique, les autorités cambodgiennes ont entrepris une oppression sévère à l’encontre des médias critiques et indépendants et des organisations de la société civile. (...)
Les élections législatives, prévues pour juillet 2018, n’ont aucune chance de légitimité si les circonstances actuelles persistent. Des mesures correctives d’envergure seraient requises pour que cette élection puisse être considérée comme authentique, participative et inclusive. Le droit à la liberté d’expression, à la liberté d’association, à la liberté d’assemblée et à la participation politique, parmi d’autres droits, sont systématiquement violés, en violation de la Constitution cambodgienne et des obligations du Cambodge en matière de droits de l’homme, notamment sous le pacte international relatif aux droits civils et politiques et les Accords de Paris.
Compte tenu de cette alarmante et rapide détérioration de la situation des droits de l’homme, de l’état de droit et de la démocratie au Cambodge, nous vous incitons à remplir vos obligations telles qu’établies dans les Accords de Paix de Paris. (...)