
La COP22 s’est achevée vendredi 17 novembre, après deux semaines de négociations perturbées par l’élection de Donald Trump à la Maison-Blanche. Les discussions de fond sur la mise en œuvre de l’accord de Paris n’ont pas réellement commencé. En revanche, les initiatives public-privé se multiplient hors de tout contrôle international.
Plusieurs points techniques devaient être abordés durant cette quinzaine : quelles informations doivent fournir les États concernant leurs engagements chiffrés de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les INDC (Intended Nationally Determined Contributions, Contributions nationales volontaires) annexées à l’accord de Paris ? Comment préparer la révision à la hausse de ces engagements ? Quelle feuille de route établir pour honorer la promesse faite en 2009 aux pays en développement par les pays développés de leur apporter 100 milliards de dollars de financements climat par an à partir de 2020 ?
« Les États sont arrivés les mains vides »
Les 190 États-membres se sont mis d’accord pour fixer l’ensemble de ces règles avant la fin de l’année 2018. Des négociations sont en cours pour savoir si elles seront adoptées au fur et à mesure ou sous la forme d’un « paquet » pendant la COP24. Pour l’heure, les négociations sur le fond n’ont pas réellement commencé. (...)
Indéniablement, les négociations ont été perturbées par l’élection du candidat républicain climatosceptique Donald Trump à la Maison-Blanche, mardi 8 novembre. « Il y a eu une onde de choc, confirme David Levai, de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Mais les politiques ont réagi de manière forte, notamment par la proclamation de Marrakech. » Ce texte, adopté jeudi par tous les États-membres, appelle à « accroître urgemment l’ambition et à renforcer [la] coopération » et soutient que « la dynamique en faveur du réchauffement, constatée toute cette année, est irréversible ».
Mercredi, le secrétaire d’Etat états-unien, John Kerry, s’est montré rassurant : « Nous sommes déterminés à tenir nos engagements [de 26 à 28 % de réduction d’émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025] », a-t-il insisté, arguant qu’« on ne fait pas forcément, une fois au pouvoir, ce qu’on a dit pendant la campagne » et que le marché « allait dicter la transition énergétique ». Quelques heures plus tôt, l’administration américaine publiait sa stratégie de décarbonation à long terme de l’économie, pour réduire ses émissions d’au moins 80 % d’ici à 2050 par rapport à 2005.
L’élection de M. Trump, analysée comme une expression de la colère d’Américains blancs issus de zones rurales délaissées, a mis le projecteur sur la nécessité d’une « transition juste », assure M. Levai : « La transition énergétique fera des gagnants et des perdants. La prise de conscience progresse qu’il faudra aider les travailleurs des secteurs en souffrance, sans quoi les résistances à la lutte contre le changement climatique seront très fortes. »
Une myriade d’initiatives public-privé
En marge de ces négociations atones, la société civile s’est montrée très dynamique. Le plan d’action Lima-Paris, lancé en 2014 lors de la COP20, a pour ambition de mobiliser entreprises, territoires (villes, régions, etc.) et ONG dans la lutte contre le changement climatique. La promesse de soutiens financiers — via les 100 milliards notamment — a excité les convoitises. (...)
Maxime Combes, d’Attac, alerte sur le fait que les Etats transfèrent peu à peu la responsabilité de la lutte contre le changement climatique à la société civile : « Ségolène Royal la désigne comme une “assurance-vie” de l’accord de Paris. L’idée circule que les marchés nous sauveront de la politique climatosceptique de Donald Trump. Ce qui est en train d’être théorisé, c’est que le dieu marché et la déesse technique doivent donner le ton de la transition énergétique. » Mais, prévient l’économiste, « la main invisible du marché n’est pas plus verte qu’elle n’est sociale ou juste. Les politiques climatiques ont besoin de règles, d’encadrement et de garanties politiques ».
La prochaine COP se déroulera à la fin de l’année 2017, à Bonn. Elle sera présidée par les îles Fidji, menacées de submersion par l’inexorable montée des océans.