
En plein essor, la filière de la viande bio met en avant un meilleur traitement des animaux. Si le cahier des charges garantit quelques progrès, les mutilations, les espaces réduits et la douleur des bêtes restent monnaie courante.
Lancés le 20 juillet, les états généraux de l’alimentation sont l’occasion de rappeler le succès de l’agriculture biologique dans nos assiettes : en un an, le nombre de producteurs bio a augmenté de 12 %. Aujourd’hui, 7,3 % des exploitations françaises sont bio. Et la viande se taille une belle tranche de ce juteux marché : le syndicat de la viande, Interbev, se félicite du « rapide développement des volumes abattus », soit +15 % entre 2015 et 2016. « La viande bio sait concilier à la fois le respect de la nature, le bien-être des animaux et le plaisir des consommateurs », assurent les industriels. L’élevage bio garantit en effet des conditions d’élevage plus respectueuses de l’environnement et une alimentation plus saine des animaux. Mais la promesse est-elle tenue concernant leur bien-être ou s’agit-il seulement de caresser le consommateur dans le sens du poil ? Autrement dit, tout le monde il est bio, tout le monde il est gentil ?
En principe, la réglementation européenne prévoit que « toute souffrance, y compris la mutilation, doit être réduite au minimum pendant toute la durée de vie de l’animal, y compris lors de l’abattage. » Dans la pratique, on est encore loin de ces belles intentions. (...)
Malgré ces points noirs, la directrice du CIWF France, une organisation dédiée aux animaux de ferme, estime que le bio présente un intérêt certain : « Même s’il reste des choses à améliorer, c’est le seul label qui affiche clairement le bien-être animal dans son cahier des charges, rappelle Léopoldine Charbonneaux. L’accès au plein air et la densité moindre dans ces élevages constituent des points très positifs. » Les animaux ont en effet généralement accès à des pâturages. Généralement, mais pas systématiquement, car tout dépend des conditions climatiques. (...)
Six poules par mètre carré
La taille des « parcours d’extérieur » des animaux ne fait pas non plus rêver. Ainsi, un porc de 120 kg a droit à une « aire d’exercice » minimum de 1,2 mètre carré. Un porc de 50 kg peut prétendre à 0,6 mètre carré. A l’intérieur de l’élevage, notre porc de 120 kg se voit attribuer une surface minimum de 1,5 mètre carré, et son congénère de 50 kg, à nouveau la moitié. « En moyenne, un cochon bio à l’engraissement a accès à 2,3 mètres carrés, contre 1 mètre carré, voire moins, en élevage conventionnel », résume Jean-François Vincent. Dans un bâtiment, un chevreau ou un agneau a droit à 0,35 mètre carré. Pour les poules pondeuses, la densité maximale prévue par le cahier des charges bio est de 6 poules par mètre carré ; quand elles sont élevées pour leur chair, elles peuvent se retrouver à 10 par mètre carré. Un même bâtiment peut contenir jusqu’à 3 000 poules pondeuses, ou 4 800 poulets élevés pour leur chair, ou 5 200 pintades… (...)
« les élevages bio présentent certes des avantages pour les consommateurs, mais guère pour les animaux. La notion de bien-être animal dans ces élevages n’est qu’un argument marketing qui vise à rassurer le consommateur. » Peta a d’ailleurs diffusé fin juillet une enquête vidéo tournée en Allemagne, dénonçant de graves maltraitances dans un élevage de chèvres estampillé bio. (...)
« Le seul critère qui figure dans [notre] cahier des charges, c’est d’abattre l’animal bio avant les autres. » Passer en premier sur la chaîne d’abattage, tel est donc le seul « privilège » des animaux issus du circuit bio. « Abattage avec ou sans étourdissement, gazage pour les cochons, mise à mort des vaches gestantes… A l’abattoir, bio ou pas, tous les animaux subissent le même sort », résume Brigitte Gothière, porte-parole de L214, l’association qui a dénoncé de nombreux cas de maltraitances dans les abattoirs. (...)