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Sous couvert de régulation, une délocalisation sur place ?
par Clotilde de Gastines - 07 Juin 2011
Article mis en ligne le 12 juin 2011
dernière modification le 10 juin 2011

En France, un tiers des emplois sont fermés aux migrants non-européens, au nom de la « protection de la main d’œuvre nationale », comme l’annonce le préambule du CESEDA : le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui rassemble les règles concernant l’immigration. En avril dernier, le ministre de l’Intérieur Claude Guéant a annoncé la réduction de l’immigration du travail de 20 000 personnes et une plus grande restriction des métiers autorisés. Pure démagogie ?

certains obstacles sont levés pour les migrants du travail (contrat d’accueil et d’intégration, bilan de compétence), mais maintenus pour le regroupement familial. Ils sont encouragés à devenir des citoyens, mais n’ont pas le droit de vote, alors que l’opinion publique y est plutôt favorable. Ils bénéficient de mesures de soutien pour exercer certaines professions, mais d’autres leurs sont fermées : près de 30% de toutes les offres d’emploi de France incluant le secteur public (fonctionnaires), 50 professions du secteur privé (vétérinaires, pilotes, marchand de tabac). Il leur est aussi interdit de se mettre à leur compte dans de nombreuses professions régulées (avocat, médecin, architecte, pharmacien).

La France fait figure d’exception parmi les pays européens, surtout parmi ceux qui cherchent à attirer des migrants qui ont un accès total au secteur privé et à l’emploi indépendant et un accès sous condition au secteur public. La Halde avait émis des recommandations en 2009 pour lever le critère de nationalité dans le secteur privé, dans le service public, les compagnies publiques et les institutions. Mais l’État préfère procéder par des accords avec des entreprises ou organismes(...)

De plus, les migrants n’ont pas l’intégralité des droits et pouvoirs syndicaux, contrairement à tous les autres pays européens. En 2004, les migrants ont notamment perdu le droit d’être élus aux Prud’hommes et aux chambres de commerce.(...)

Les étrangers séjournant régulièrement sur le territoire français seraient de plus en plus précarisés, socialement et économiquement, du fait de titres de séjour de plus en plus courts et de l’arbitraire des procédures administratives. La complexité favoriserait le travail au noir, lui-même responsable de dumping social. Cette critique émane d’une vingtaine de députés européens et nationaux qui ont fait le bilan de la politique d’immigration française dans un audit rendu public le 11 mai 2011.

Pour François Brun, cela revient à constater une « délocalisation sur place : une combinaison de conditions de production qui s’approchent de celles qu’offrirait la délocalisation dans les pays du Sud et d’une production « sur place ». Dans le contexte actuel de précarisation générale du travail, l’instabilité est d’autant plus grande. Les intérimaires sont en général les moins bien protégés. Certains métiers sous-payés, pénibles ou dangereux (restauration, nettoyage, bâtiment, gardiennage, confection) sont devenus ethniques, car il est beaucoup plus difficile de changer de secteur d’activité lorsqu’on n’a pas un titre de séjour durable. À Avignon par exemple, les Turcs sont plutôt dans le BTP, alors que les Maghrébins sont dans l’agriculture. À Marseille, les Comoriens dans la restauration. La concentration du nombre d’étrangers dans un métier influence le droit réel ».

Ainsi, plusieurs enquêtes du sociologue dans le milieu de la confection du Sentier à Paris, démontrent comment ces pratiques s’instaurent en parallèle du droit du travail. (...)

L’audit des parlementaires note ainsi sans surprise que « la politique du chiffre coûte cher et mobilise trop de fonctionnaires ; son efficacité est remise en question ; les coûts de la politique de lutte contre l’immigration illégale sont accusés d’opacité ; le contentieux des étrangers, nombreux, surchargent les tribunaux ».(...) Wikio