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Talents Hauts, la maison d’édition jeunesse qui piétine les stéréotypes
Article mis en ligne le 7 avril 2018
dernière modification le 6 avril 2018

Les petites filles n’aimeraient-elles que la danse, et les garçons le foot ? Depuis 2005, la maison d’édition Talents Hauts s’attache à ne pas mettre les enfants dans des moules, et valorise au contraire leur différence et leur libre arbitre.

e garçon-là n’aime pas le foot et il n’ose le dire à son père. « Alors, tous les dimanches, qu’il pleuve à gros bouillons, ou que la neige couvre le gazon, on part à l’entraînement. » Cette petite fille-là n’aime pas la danse et n’ose pas le dire à sa mère. « Alors, tous les mercredis, j’enfile mon tutu. Mais j’aime pas les tutus. Ça gratte et c’est rose. » Et puis il y a cette Blanche-Neige qui n’en peut plus de s’occuper des soixante-dix-sept nains qui lui réclament sandwichs, histoires et repassage à longueur de journée. Il y a ces cocottes qui en ont ras-le-bol du coq qui ne fait jamais le ménage dans le poulailler. Ces princesses qui partent en quête de dragons, laissant au château des princes trop peureux. Ces papas qui ont le droit de changer des couches et ces mamans qui ont le droit de sortir avec leurs copines, et inversement.

Tous ces personnages sortent des pages des beaux albums édités par Talents Hauts qui, depuis 2005, s’attache à contrer vaillamment les stéréotypes empoisonnant trop souvent la littérature jeunesse. (...)

Laurence Faron, directrice des éditions, rappelle ce qui semble être une évidence. « Les livres pour enfants et adolescents sont et resteront des vecteurs d’une représentation du monde : on ne peut pas faire l’économie d’une réflexion et d’une action sur les livres que lisent nos jeunes. » (...)

Point de provocation dans les livres que publie Talents Hauts, mais une simple remise en ordre des choses. (...)

Hypersexualisation des petits filles vs. hypervirilisation des garçons
Les enfants ont leur libre-arbitre, mais il leur est parfois difficile de l’exercer, comme le remarque Stéphanie Richard, auteure chez Talents Hauts de la série des J’aime pas (la danse, le foot, être belle…), qui fait régulièrement des interventions en maternelle et en primaire. « A chaque fois je fais un petit test, et les réponses sont à peu de choses près toujours les mêmes. Je demande s’il y a des filles qui aiment le foot. Là, il y en a toujours une ou deux qui lèvent la main, et en général elles revendiquent assez fort cette passion. Quand je demande s’il y a des garçons qui aiment le rose, alors là ce n’est pas pareil : ils se regardent entre eux, ils se demandent s’il y en a un qui va oser lever la main, ça flotte, ça ricane... » Stéphanie Richard conclut qu’il est toujours admis pour une fille d’être un « garçon manqué » – « expression tout à fait laide » – mais que pour les garçons c’est une autre histoire. (...)

si l’hypersexualisation des petites filles est un problème dans la littérature jeunesse, l’hypervirilisation des garçons en est un autre. « Le travail est vraiment à faire de ce côté aujourd’hui. »

« Le stéréotype, c’est faire passer une représentation comme quelque chose de normatif. Il faut faire attention parce que tous ces clichés, qu’ils soient conscients ou non, volontaires ou non, se transmettent aux enfants par les livres. Et puis à cet âge-là ,on ne lit pas une seule fois un album, mais trente, cinquante fois, il marque donc énormément, et c’est loin d’être neutre. (...)

Laurence Faron lutte donc contre toutes ces vilaines et malencontreuses habitudes que nous avons intégrées malgré nous. Dans sa tribune, elle lance un appel à plus de bon sens, d’éducation et de sensibilisation dans la littérature jeunesse et indique que, depuis l’affaire Weinstein et la déferlante qui a suivi, son équipe et elle se sentent moins seules (...)

Mais au moment de nous quitter, elle ajoute qu’en matière de féminisme c’est souvent « un pas en avant, trois pas en arrière ». Haut les cœurs !