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Trois méthodes pour élever son fils dans le respect des femmes
Article mis en ligne le 6 mars 2021

L’actualité de ces dernières semaines m’a beaucoup fait réfléchir, en tant que femme et en tant que mère. Plusieurs souvenirs difficiles sont remontés à la surface : celles d’entre nous qui n’ont pas subi de viol ou d’agression sexuelle ont tout de même fait l’expérience de situations à risque ou de mauvaises rencontres. En écoutant le témoignage de Christine Blasey Ford, j’ai pensé à ma fille de 4 ans et à la manière dont je pouvais lui apprendre à survivre dans ce monde misogyne.

Toutefois, face aux vociférations de Kavanaugh et de Trump, j’ai surtout pensé à mon fils de 7 ans : que pouvais-je faire pour qu’il devienne un homme respectueux d’autrui ? Un homme qui n’agressera pas les femmes, avant toute chose, mais qui ne fera pas non plus de plaisanteries libidineuses, qui ne mettra pas de mains aux fesses, qui ne se moquera pas des victimes... Bref, qui ne traitera pas les femmes comme des êtres inférieurs ? (...)

Certains protocoles de prévention en milieu scolaire et universitaire ne s’adressent qu’aux femmes. Faut-il souligner le ridicule de la situation ? Les individus les mieux placés pour prévenir les agressions sexuelles ne sont-ils pas avant tout ceux qui commettent la plupart d’entre elles ?

C’est mon analyse. Une analyse partagée par de nombreux spécialistes de la violence sexuelle, qui comprennent les dynamiques sociales et émotionnelles qui alimentent cette violence. Fort heureusement, leurs travaux montrent que les parents ont de nombreux outils à leurs dispositions –même vis-à-vis des jeunes garçons– pour encourager le respect et l’empathie envers les femmes, et réduire les risques ultérieurs de violence sexuelle. Et la plupart de ces méthodes peuvent être utilisées sans prononcer une seule fois le mot « sexe ». « Nous enseignons tous le respect (ou l’absence de respect) sexuel à nos enfants, et cette éducation peut passer par les plus petits détails », explique Emily Rothman, chercheuse en santé communautaire à l’école de santé publique de l’université de Boston.

Voici ce que j’ai appris de certaines de ces méthodes.

Méthode n°1 : Faites en sorte que vos fils puissent ressentir et parler de leurs émotions aussi facilement que possible (...)

La restriction de la liberté émotionnelle masculine a un autre effet néfaste. « S’ils sont incapables de prendre conscience de leurs propres sentiments d’inconfort ou de malaise, ils auront plus de mal à identifier ces sentiments chez les autres, explique Poco Kernsmith, chercheur en prévention de la violence à l’université de Wayne State. Ils auront également plus de mal à apprendre l’empathie. » (...)

Chez l’homme, un mauvais contrôle des émotions conduirait aussi à des consommations excessives de drogues (qui sont également –et indépendamment– liées aux violences sexuelles).

Méthode n°2 : Apprenez à vos enfants à fixer les limites de leur espace personnel et à respecter celles d’autrui

Imaginons que grand-maman vienne leur rendre visite, et que vous leur disiez de lui faire un bisou. Une instruction on ne peut plus innocente en apparence. Mais dans les faits, vos enfants en déduisent qu’il est acceptable de forcer autrui (ou d’être forcé) à embrasser quelqu’un. (...)

Lorsque vous avez besoin d’envahir l’espace personnel de votre enfant, il est préférable de « demander son consentement de manière claire et ostensible », soutient Rothman, qu’il s’agisse de soulever son t-shirt pour regarder un bobo ou de lui faire un câlin. Cela peut sembler un peu exagéré, mais il est important de montrer à vos enfants que vous respectez leur autonomie corporelle et leur espace personnel. Ils comprennent ainsi à la fois que leur corps leur appartient, et que le corps d’autrui n’appartient qu’à autrui. (...)

Dans la même veine, il est nécessaire de leur expliquer l’importance de la notion de vie privée, et de la respecter. (...)

En fonction de la maturité de votre fils, vous pouvez également lui parler du consentement sexuel. Veillez à ce qu’il comprenne que « le consentement n’est pas seulement une condition sine qua non : il doit également faire l’objet d’une discussion, il doit être clairement établi », avance Kristin Moilanen, psychologue du développement à l’université de Virginie-Occidentale. (...)

Méthode n°3 : Enseigner les comportements respectueux par l’exemple, et échanger régulièrement avec ses enfants à ce sujet

« Les enfants font généralement bien plus attention à ce que vous faites qu’à ce que vous dites », assure Mark Van Ryzin, chercheur en psychologie de l’éducation (Université de l’Oregon). Les garçons tirent de nombreux enseignements de la manière dont leur père traite leur mère, et de la façon dont les conflits sont résolus au sein de la famille. (...)

Dans la mesure du possible, faites de telle sorte que le respect, l’écoute et l’équité soient la norme pour tous les membres de votre famille –ce qui inclut le respect que vous témoignez à vos enfants. (...)

Selon plusieurs travaux de recherche, les cris et l’autorité abusive rendraient les enfants plus susceptibles d’agresser leurs partenaires, tandis qu’une attitude bienveillante et la mise en place de limites claires auraient l’effet l’inverse.

Comment se comporter lorsque notre fils agit d’une manière que nous jugeons agressive ou irrespectueuse ? Rothman conseille de relever le comportement problématique sur le moment (en lui expliquant par exemple qu’il est en train de toucher sa sœur d’une façon déplacée), mais elle précise aussi qu’il est important de reparler de l’incident plus tard, une fois le calme revenu. (...)

Rothman affirme qu’il peut être bon d’évoquer les conséquences : « Si tu agrippes quelqu’un comme ça à l’école, tu seras envoyé dans le bureau du proviseur » ; « À l’âge adulte, ce comportement est illégal ». Le fait de parler des conséquences souligne l’importance de la responsabilité personnelle, qu’il est crucial d’enseigner aux garçons, et notamment le fait que « rien ne peut atténuer cette responsabilité », souligne Moilanen, y compris la consommation d’alcool.

Et si vous entendez votre fils tenir des propos sexistes (un jour, le mien a dit qu’il ne jouait pas au foot avec les filles parce qu’elles étaient moins douées et qu’elles pleuraient trop), il est préférable de ne pas le réprimander. Une approche réfléchie peut s’avérer plus indiquée (...)

Les exemples à ne pas suivre ne manquent pas

L’idéal serait d’avoir ce genre de conversations avec nos fils dès que ces situations propices se présentent. Rien ne sert de leur en parler en tête-à-tête tous les trente-six du mois : il vaut mieux en faire une composante habituelle de vos discussions familiales, sans pression aucune. Non seulement votre fils se montrera plus réceptif, mais il sera d’autant plus susceptible de venir vous voir dès qu’une situation difficile ou troublante se présentera.

Et si votre fils est assez âgé pour suivre l’actualité, servez-vous-en pour lancer une conversation : les occasions ne manquent pas, de nos jours. (...)