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UE - Nouveaux OGM : un rapport politique... sous camouflage scientifique
Article mis en ligne le 17 septembre 2017

Le Mécanisme de Conseil Scientifique – un comité établi par la Commission européenne - a publié fin avril 2017 un rapport sur les nouveaux OGM, plus politique que scientifique. Officiellement, ce rapport constitue une note explicative « à jour » sur le sujet pour la Commission européenne. Mais, officieusement, il pourrait bien servir à préparer un changement de définition d’un « OGM », comme cela est en cours aux États-Unis... Le tout en parfaite contradiction avec le Protocole de Cartagena, pourtant ratifié par l’UE.

(...) En préambule, le rapport prévient le lecteur que « les termes sont utilisés selon leur signification scientifique plutôt que juridique ». Un avertissement pourtant très approximatif car le SAM a travaillé avec un classement des techniques faux sur le plan juridique et flou sur le plan scientifique, par manque de définitions préétablies et par oublis de nombreux points. (...)

Une utilisation asymétrique et biaisée de certains constats scientifiques

Le rapport aborde beaucoup de données scientifiques liées à ces techniques de modification génétique et à leur mise en œuvre. Mais d’une part, le style rédactionnel adopté apparaît choisi pour minimiser plusieurs « problèmes » qui seront dès lors rapidement oubliés, et d’autre part cette quasi-exhaustivité disparaît de manière critique dans le résumé qui reste la partie principalement lue – sinon la seule - par les responsables politiques. Le rapport évoque ainsi certains effets non intentionnels liés à ces nouvelles techniques, effets qui font l’objet « de beaucoup de recherches actuellement » [8]. Il renseigne également l’absence de contrôle des sites d’insertion de « gènes » [9] ; que les gènes ou les modifications génétiques sont insérés de façon aléatoire induisant des mutations ou une modification de l’expression d’autres gènes [10] ; et qu’il est difficile d’éliminer les effets non intentionnels même après plus de 15 rétro-croisements successifs [11] ou de détecter toutes les mutations, sans compter les épimutations, par séquençage [12]. Sont également évoqués les problèmes liés à la mise en œuvre des techniques connexes aux modifications génétiques comme la culture de protoplastes et la régénération de plantes qui occasionnent mutations et épimutations [13] ; les problèmes liés à la technique Crispr/Cas9 qui nécessite une intégration d’ADN dans le génome qui augmente les chances d’effets hors-cible ou l’emploi des ARN ou complexes nucléoprotéiques contaminés par de l’ADN [14] ; ou encore les échanges qui ont lieu entre porte-greffe et greffon (allant de petites molécules comme les ARN à de l’ADN, le tout pouvant s’exprimer dans les parties non-OGM).

Autant d’effets ou limites qu’Inf’OGM a déjà détaillés en 2016 [15] [16]. Mais le SAM, malgré cette liste d’effets non intentionnels, hors-cible, d’absence de maîtrise ou de nécessité de continuer les recherches scientifiques, suggère fortement – tout en se gardant bien de conclure - une solution étonnante : ne plus considérer la technique mais uniquement le produit final pour l’évaluation des risques. (...)

Une opinion qui laisse perplexe d’autant que le SAM affirme également par ailleurs que « les dangers potentiels des produits finaux obtenus par différentes techniques d’amélioration dépendent de leurs caractéristiques dont font partie les effets intentionnels et non intentionnels aux niveaux génétiques et phénotypiques » (...)

Par plusieurs aspects, le rapport du SAM rappelle la proposition en cours de discussions aux États-Unis pour modifier la définition de ce qu’est un OGM [19]. Mais on notera surtout que sa suggestion à ne considérer que le produit final et non la technique utilisée, rejoint celle du Conseil consultatif des Académies des sciences européennes [20]. Ce réseau d’Académies des sciences demande que les produits issus de ces nouvelles techniques – lorsqu’ils ne contiennent pas d’ADN étranger – ne soit pas soumis au champ d’application de la législation sur les OGM. Un réseau qui a participé... au rapport du SAM.

Le point saillant, de la détection à la traçabilité (...)

Sur cette question, le rapport du SAM fait preuve de la même étonnante ambiguïté : il mentionne tous les constats scientifiques qui permettent d’envisager une traçabilité mais se refuse d’en conclure à sa faisabilité. Le résumé dit explicitement : « la détection de tous changements obtenus par quelque technique que ce soit […] est possible avec différentes méthodes si une information moléculaire détaillée est disponible a priori ». Conclusion : sans cette information a priori, pas de détection possible. Or les chercheurs de l’Inra [21] et du réseau ENGL hébergé par le Centre Commun de Recherche d’Ispra, organe de la Commission européenne, ont montré qu’il était possible de détecter des OGM inconnus (donc sans information préalable)… Cherchez l’erreur !

Le SAM précise également qu’il « est généralement impossible de distinguer la cause d’un changement, qu’il soit naturel ou le fait d’une technique d’amélioration ». Une conclusion du rapport pourtant contredite par les données scientifiques fournies dans ce même rapport. (...)

La présence d’opinions, de recommandations, d’un contenu qui se veut exhaustif mais asymétrique dans ses conclusions… tout suggère que ce rapport répond à une commande politique plutôt que scientifique. (...)