Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Mediapart
« Un plat de résistance » : les Restos du cœur sous l’oeil d’une anthropologue
#restosducoeur #faim #inegalites
Article mis en ligne le 13 mars 2023

L’aide alimentaire est devenue indispensable pour une partie de la population précaire, mais ce système reste porteur de violences structurelles pour ses bénéficiaires. Entretien avec l’anthropologue Bénédicte Bonzi, qui vient de publier « La France qui a faim » et rend hommage au travail des bénévoles.

Chaque année, en France métropolitaine, entre 2 et 4 millions de personnes bénéficient de l’aide alimentaire en nature, selon les différentes sources. Son public est hétérogène et la crise sanitaire a aggravé la situation. De l’autre côté, ce sont 10 millions de tonnes de nourriture qui sont perdues ou gaspillées chaque année.

Pour explorer ces paradoxes et la survivance de l’aide alimentaire dans un pays d’abondance, le « pays de la bouffe » selon les mots de Coluche, Bénédicte Bonzi, docteure en anthropologie sociale, chercheuse associée au Laios (Laboratoire d’anthropologie des institutions et des organisations sociales), a réalisé une immersion aux Restos du cœur, pour aller au-delà du concert des Enfoirés.

De ce travail, elle vient de tirer un livre, La France qui a faim, le don à l’épreuve des violences alimentaires, paru aux éditions du Seuil. Elle y décrit un « marché de la faim » désormais pérenne mais constellé de violences structurelles à l’égard des bénéficiaires de l’aide alimentaire, qui perdure pour maintenir la paix sociale. (...)

"les maraudes, c’est un monde particulier, on a le sentiment de passer une frontière et d’arriver dans un État de non-droit. Dans certains endroits, on va enjamber des rats pour atteindre le point de distribution. Quand on dispose les repas, certains bénéficiaires sont déjà endormis parce qu’il est trop tard. Il faut qu’on soit attentif pour que les animaux ne mangent pas la nourriture avant les hommes. Et ça, c’est quelque chose qui est peu raconté.

Pour ce livre, j’ai beaucoup relu Coluche pour m’imprégner. Ce qui revient beaucoup dans ses propos et chez les bénévoles aussi, c’est qu’il n’est pas normal que dans « le pays de la bouffe », il y en ait qui n’en aient pas ou pas assez. Je voulais aussi rendre compte de cette anormalité qui dure depuis plus de 30 ans, en fait, depuis la création des Restos du cœur. Coluche voulait simplement créer un rapport de force avec l’État pour imposer que les choses changent. Pas créer un système pérenne." (...)

" la violence, elle est toujours là parce de fait, là, on ne répond pas aux droits des personnes. Donc, on la contient. On fait au mieux. On rétablit la tension, l’amour, l’entraide et la solidarité. Mais parfois, ça ne suffit pas. " (...)

"Je pense qu’il faut transformer le système alimentaire et qu’il faut sortir une partie de l’alimentation du marché pour que ce soit quelque chose de commun." (...)

Ecouter le podcast (35’ - France-Culture)
Aide alimentaire : état d’urgence
L’alimentation est redevenue un sujet politique central depuis les débuts de la pandémie de Covid-19. Comment fonctionne l’aide alimentaire en France, entre réseaux associatifs et dispositifs publics ? Quelles pistes pour une aide alimentaire efficace ? (...)