
Israël : société sans classe, soudée par le consensus sioniste, peuple en arme pour défendre sa terre ? S’il n’en a jamais été vraiment ainsi, le mouvement des objecteurs de conscience montre que des failles sont là, ouvertes, et de plus en plus visibles.
. Il montre, en résonance avec d’autres pratiques contestatrices, que l’emprise de l’idéologie dominante se délite. La normalisation de l’État israélien – souvent invoquée comme repoussoir au fait de considérer sérieusement l’existence, sur place, de critiques en acte du sionisme – est donc bien, n’en déplaise à ceux qui préfèrent le confort de la déploration et de l’attente, assez avancée pour que des lignes de fuite s’expérimentent.
Celle qu’empruntent les objecteurs de conscience en refusant de servir, partiellement (dans les territoires occupés), ou totalement, est particulièrement éclairante dans un pays où l’armée forme la clef de voûte d’un consensus fragilisé.Les Israéliens sont de plus en plus nombreux à ne pas vouloir participer militairement à la construction du projet sioniste.
Près d’un millier d’entre eux ont été emprisonnés depuis un an ; de nombreux conscrits préfèrent en effet subir deux mois de prison plutôt que de « risquer leur vie pour quelques colons ». Et le nombre de réservistes qui parviennent à éviter de participer aux forces d’occupation sans subir d’incarcération (maladie, religion, incorporation hors des territoires occupés, etc.), s’il est impossible à évaluer, ne cesse lui aussi de croître.
Sous le consensus, de multiples formes de défection sont ainsi mises en œuvre et viennent s’ajouter au refus explicite des objecteurs. (...)
Sortant de la logique des sionistes de gauche – on manifeste contre la guerre, on tire, on pleure –, l’objection est désormais choisie parmi des couches de plus en plus larges et diverses de la population. (...)