
Le 30 décembre, Didier Magnien a écopé de quatre mois de prison avec sursis et mille euros d’amende pour des menaces de mort, proférées sur Twitter, contre le sociologue Éric Fassin. La victime regrette que le procureur de Saint-Brieuc ait écarté un procès public en optant pour le « plaider-coupable ».
l avait tweeté sous son vrai nom, le 17 octobre, au lendemain de l’assassinat de Samuel Paty. S’adressant à l’universitaire Éric Fassin, qui re-partageait un billet de blog publié après les attentats de 2015, Didier Magnien écrivait ceci : « Je vous ai mis sur ma liste de connards à décapiter pour le jour où ça pétera. Cette liste est longue mais patience vous y passerez. Rappelez vous, la révolution n’a pas eu lieu du jour au lendemain. »
Le sociologue avait fait état de ces menaces dans Le Club de Mediapart (dont il est un contributeur régulier), y voyant un nouveau signe que « les extrêmes droites s’enhardissent ». Il avait également déposé plainte le 24 octobre, avec le soutien de son université, Paris 8.
Deux mois plus tard, à l’issue d’une enquête menée par la police judiciaire de Rennes, Didier Magnien a été arrêté, placé en garde à vue et condamné à quatre mois de prison avec sursis par le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, mercredi 30 décembre, d’après les informations de Mediapart. Figure de la mouvance néonazie des années 1990, cet ingénieur aujourd’hui âgé de 51 ans vit habituellement en Allemagne, mais passait les fêtes de fin d’année en Bretagne. Son casier judiciaire était vierge jusqu’ici.
Didier Magnien ayant reconnu les faits en garde à vue, le parquet de Saint-Brieuc a décidé de régler cette affaire rapidement, grâce à une « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » (CRPC), la procédure de « plaider-coupable ». Ce qui scandalise le plaignant.
« Le plaider-coupable revient à dire que l’affaire est close : n’en parlons plus. On n’en saura pas davantage. Le procès public aurait au contraire permis de s’interroger sur la nature politique de ces menaces. J’imaginais que j’avais mon mot à dire là-dessus. »
Le profil de Didier Magnien est effectivement intrigant, à plus d’un titre. En 1998, Libération lui attribue la co-paternité d’un fanzine, Terreur d’élite, qui se définit comme la « voix indépendante et radicale des nationaux-socialistes francophones ». « Les lecteurs juifs sont menacés d’être transformés en “abat-jour, en savonnettes ou en engrais”, ce qui provoque bientôt l’ouverture d’une information judiciaire », écrit le quotidien à l’époque, précisant que « les Hammer Skinheads sont recherchés, et en 1995 Magnien va prendre l’air en Allemagne ».
Le livre Les droites extrêmes en Europe (Seuil, 2015), de Jean-Yves Camus et Nicolas Lebourg, retrace aussi le parcours de Didier Magnien. D’après leur ouvrage, c’était un « cadre du PNFE », le Parti nationaliste français et européen, un groupuscule néonazi, suprémaciste et antisémite, dont plusieurs membres ont été poursuivis pour des attaques à la bombe visant des immigrés et pour la profanation du cimetière juif de Carpentras en 1990.
Après la dissolution du PNFE, en 1999, Jean-Yves Camus et Nicolas Lebourg rappellent que Didier Magnien « a milité à Unité radicale », le mouvement dont était issu Maxime Brunerie, auteur de la tentative d’assassinat de Jacques Chirac en 2002. Et qu’il s’est beaucoup rapproché du NPD, le parti néonazi allemand, après son déménagement. « Cela a amené son arrestation en 2004, dans le cadre d’une opération visant à empêcher un attentat néonazi contre un centre communautaire juif de Munich, mais également à la révélation qu’il était membre du service de protection de la Constitution en charge de la surveillance et de la répression des activités néonazies. » (...)
l avait tweeté sous son vrai nom, le 17 octobre, au lendemain de l’assassinat de Samuel Paty. S’adressant à l’universitaire Éric Fassin, qui re-partageait un billet de blog publié après les attentats de 2015, Didier Magnien écrivait ceci : « Je vous ai mis sur ma liste de connards à décapiter pour le jour où ça pétera. Cette liste est longue mais patience vous y passerez. Rappelez vous, la révolution n’a pas eu lieu du jour au lendemain. »
Le sociologue avait fait état de ces menaces dans Le Club de Mediapart (dont il est un contributeur régulier), y voyant un nouveau signe que « les extrêmes droites s’enhardissent ». Il avait également déposé plainte le 24 octobre, avec le soutien de son université, Paris 8.
Deux mois plus tard, à l’issue d’une enquête menée par la police judiciaire de Rennes, Didier Magnien a été arrêté, placé en garde à vue et condamné à quatre mois de prison avec sursis par le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, mercredi 30 décembre, d’après les informations de Mediapart. Figure de la mouvance néonazie des années 1990, cet ingénieur aujourd’hui âgé de 51 ans vit habituellement en Allemagne, mais passait les fêtes de fin d’année en Bretagne. Son casier judiciaire était vierge jusqu’ici.
Didier Magnien ayant reconnu les faits en garde à vue, le parquet de Saint-Brieuc a décidé de régler cette affaire rapidement, grâce à une « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » (CRPC), la procédure de « plaider-coupable ». Ce qui scandalise le plaignant.
« Le plaider-coupable revient à dire que l’affaire est close : n’en parlons plus. On n’en saura pas davantage. Le procès public aurait au contraire permis de s’interroger sur la nature politique de ces menaces. J’imaginais que j’avais mon mot à dire là-dessus. »
Le profil de Didier Magnien est effectivement intrigant, à plus d’un titre. En 1998, Libération lui attribue la co-paternité d’un fanzine, Terreur d’élite, qui se définit comme la « voix indépendante et radicale des nationaux-socialistes francophones ». « Les lecteurs juifs sont menacés d’être transformés en “abat-jour, en savonnettes ou en engrais”, ce qui provoque bientôt l’ouverture d’une information judiciaire », écrit le quotidien à l’époque, précisant que « les Hammer Skinheads sont recherchés, et en 1995 Magnien va prendre l’air en Allemagne ».
Le livre Les droites extrêmes en Europe (Seuil, 2015), de Jean-Yves Camus et Nicolas Lebourg, retrace aussi le parcours de Didier Magnien. D’après leur ouvrage, c’était un « cadre du PNFE », le Parti nationaliste français et européen, un groupuscule néonazi, suprémaciste et antisémite, dont plusieurs membres ont été poursuivis pour des attaques à la bombe visant des immigrés et pour la profanation du cimetière juif de Carpentras en 1990.
Après la dissolution du PNFE, en 1999, Jean-Yves Camus et Nicolas Lebourg rappellent que Didier Magnien « a milité à Unité radicale », le mouvement dont était issu Maxime Brunerie, auteur de la tentative d’assassinat de Jacques Chirac en 2002. Et qu’il s’est beaucoup rapproché du NPD, le parti néonazi allemand, après son déménagement. « Cela a amené son arrestation en 2004, dans le cadre d’une opération visant à empêcher un attentat néonazi contre un centre communautaire juif de Munich, mais également à la révélation qu’il était membre du service de protection de la Constitution en charge de la surveillance et de la répression des activités néonazies. » (...)
Mercredi, juste après avoir appris qu’une CRPC devait avoir lieu, Éric Fassin a écrit au parquet pour signaler qu’il s’y opposait. Dans son message, il rappelle notamment la volonté affichée par le gouvernement de lutter contre les discours de haine visant les fonctionnaires, après l’assassinat de Samuel Paty. Cela n’a pas eu d’effets.
Les délais n’ont permis ni au plaignant, ni à son avocat, d’assister à l’audience d’homologation, qui a entériné la peine proposée mercredi après-midi. Contacté par Mediapart, le parquet de Saint-Brieuc n’a pas souhaité expliquer son choix. Une audience civile, prévue en février, doit encore statuer sur les dommages et intérêts accordés à la victime, qui prévoit de les reverser à une association. (...)
tout au long de l’enquête, Éric Fassin a apporté des éléments supplémentaires aux enquêteurs : sur le passé politique de Didier Magnien, mais aussi sur sa présence potentielle en France pendant les vacances. Grâce à une initiative surprenante de sa part.
Dans la nuit du 22 au 23 décembre, Didier Magnien envoie un long mail à Éric Fassin. Prétendant découvrir l’affaire par la presse, et se déclarant « sidéré », il affirme alors que son compte a été piraté. S’il reconnaît avoir fait partie de mouvements d’extrême droite « il y a 26 ans en France », il explique que « depuis de l’eau a coulé sous les ponts » et qu’il a même « travaillé en Allemagne à l’encontre de ceux-ci », citant un procès dans lequel il a témoigné. « Le message de haine écrit en mon nom est en effet particulièrement violent et stupide », poursuit Didier Magnien, qui propose à Éric Fassin de retirer sa plainte pour qu’ils se retournent, ensemble, contre l’usurpateur.
Ce message a mis la puce à l’oreille d’Éric Fassin. Supposant que Didier Magnien était de retour en France et cherchait à se prémunir des poursuites, il fait part de ses soupçons à la police. Dans la foulée, Didier Magnien est arrêté. Face aux policiers, puis au magistrat, le spectre d’un pirate s’est volatilisé : il reconnaît finalement les faits et accepte sa condamnation.