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Valls médiatique
Article mis en ligne le 18 novembre 2013

Quel est le traitement médiatique réservé à Manuel Valls ? À sa personne, et non à sa politique ; car en dépit de la complaisance dont elle bénéficie, cette politique est bien souvent reléguée au second plan de l’espace médiatique occupé par un ministre devenu en quelques mois « incontournable ».

les grands médias se contentent bien souvent d’une salve de sondages fumeux et de prévisions oiseuses. Mais paradoxalement, en multipliant les sujets sur la politique (politicienne), cette médiatisation outrancière est vouée à dépolitiser le débat et les enjeux (politiques). Le « cas » de Manuel Valls n’est qu’un « cas » particulier d’un phénomène plus général : c’est surtout à ce titre qu’il nous intéresse.

Qu’importe le sondage, pourvu qu’on ait l’ivresse…

Ce qui frappe lorsque l’on se penche sur le traitement par les médias de Manuel Valls au cours de ces derniers mois, c’est la façon dont chaque article le concernant s’appuie sur une enquête d’opinion ; au mieux, les chiffres accompagnent l’analyse, au pire, ils s’y substituent et constituent, à eux seuls, « l’information ». (...)
Si la presse papier ne s’est pas ménagée pour couvrir l’actualité du ministre de l’Intérieur, les radios et les télévisions ne furent pas en reste : entre mi août et mi-octobre, Manuel Valls fut invité sur toutes les grandes chaînes, parfois à plusieurs reprises. Il fut notamment l’invité de choix le 26 août de la première du « Grand Journal » de Canal + désormais présenté par Antoine De Caunes, et fut interrogé à quelques jours d’intervalle dans les matinales d’Europe 1, de France Inter, de RTL et de BFM. Rien de moins…À force d’être invité et entendu partout et par tous, il devint littéralement « incontournable ». Détail révélateur, même quand il n’est pas l’objet du reportage, son « aura médiatique » mérite qu’on s’y arrête ; ce fut par exemple le cas lors du retour de l’émission Comme on nous parle sur les ondes de France Inter le 30 août au cours de laquelle Vanessa Schneider, chroniqueuse dans l’émission, commença de dresser le portrait d’Arnaud Montebourg rappelant qu’il était « une des personnalités du gouvernement les plus populaires ». Pascale Clark s’empressa alors d’ajouter « après Manuel Valls ». Et personne n’y trouva à redire.

Reste que les mêmes qui s’extasient devant « Le fol été médiatique de Manuel Valls », osent parfois quelques (petites) réserves : sur le site francetvinfo, une journaliste souligne ainsi début août que « Le ministre de l’Intérieur est partout, même là où il n’est pas attendu. Avant de s’interroger « En fait-il trop ? » Question qui a au moins l’avantage de semer le doute dans l’esprit de l’observateur : il est légitime de se demander si le ministre ne cherche pas à tout prix à faire parler de lui. Mais il faudrait reconnaître dans le même temps que les médias en question ne font rien pour l’en empêcher. (...)

Quand la presse se penche – enfin – sur l’action politique du ministre, la titraille suggère que ce dernier la mène au moins en partie au nom de ses « bons sondages »
(...)

Autrement dit, les bons sondages sont là pour cautionner de nobles combats (notamment contre l’extrême droite) ; en cas de tendances défavorables, mieux vaudrait s’abstenir ? Aussi répandue soit-elle dans le monde politique, rien n’oblige les grands médias à endosser cette vision du combat politique assez consternante. Mais sans doute sont-ils trop heureux d’infléchir le cours des choses politiques en relayant ces sondages ineptes. En ramenant des combats politiques nécessaires à de simples questions de « taux d’opinions favorables », ils dépolitisent, dégradent et aseptisent des enjeux de fond. Mais plus ces sondages se diffusent et plus ces médias sont visibles. Dès lors, comment empêcher qu’ils (en) usent et abusent ?

À sondage oiseux, interprétation biaisée…et réversible (...)

Si ces études disent quelque chose, c’est donc davantage sur les pratiques médiatiques et leurs effets que sur le ministre lui-même ou sa politique. Car sondage après sondage naît une sympathie (ou une antipathie) auprès des Français qui sera par nature fragile et changeante. (...)