
Le député travailliste Jeremy Corbyn est, d’après les sondages, largement en tête des intentions de vote pour l’élection au poste de leader du Labour qui a débuté le 14 août et doit se terminer le 10 septembre. Du coup, comme cela s’était déjà produit lors du référendum du 5 juillet 2015 qui a vu le peuple grec refuser le diktat de la troïka, la presse de marché est le relai empressé des dominants pour tenter de discréditer par tous les moyens discursifs celui qu’elle présente comme un dinosaure-gauchiste-barbu-sectaire-et-végétarien.
Dans Deux siècles de rhétorique réactionnaire [1] Albert O. Hirschmann attire notre attention « sur certains arguments-types que reprennent invariablement les tenants des (...) mouvements de réaction » [2].
En s’inspirant de cette démarche, et en nous appuyant sur un corpus de 10 articles parus entre le 28 juillet et le 17 août [3], nous avons identifié cinq arguments-types utilisés par les médias pour essayer d’enlever toute crédibilité à la candidature de Jeremy Corbyn.
1/ Jeremy Corbyn fait le jeu des conservateurs car avec lui à sa tête le Labour perdra les législatives de 2020. (...)
2/ La fin du Labour
Il s’agit de la thèse de la mise en péril également mise en évidence par Hirschmann. (...)
3/ Corbyn est un homme du passé...
... donc dépassé et sans intérêt, un has been vintage pour archéo-loosers. (...)
4/ C’est à cela qu’on reconnaît le gauchiste Corbyn : il est fou, possédé par le diable, il mange les enfants et, en plus, il manque d’objectivité [6]. Frissons et sueurs froides garantis... (...)
5/ Corbyn est-il un farfelu végétarien ou un cycliste excentrique ?
Moquer le style (de vie) de Jeremy Corbin est un moyen de jeter la suspicion, par une forme d’effet de contamination, sur ses propositions politiques. (...)
Qu’ils s’expriment directement ou qu’ils se réfugient derrière les propos d’ « experts » ou de « spécialistes » soigneusement choisis, les auteurs ds articles étudiés ont donc à leur disposition une série d’arguments-types qu’ils peuvent mobiliser (et combiner entre eux dans un même article) plus ou moins intensément et durablement selon le type de public visé et l’effet recherché.
La candidature de Jeremy Corbyn à la tête du Labour est l’occasion de voir les médias dominants de tous bords prendre très rapidement toutes les armes discursives sauf une : l’heure n’est plus à la promotion de la culture du débat.