
C’est la petite boîte qui monte. Pas si petite en réalité : Ÿnsect vient de réaliser une levée de fonds record de 110 millions d’euros pour financer la plus grande usine mondiale de production d’insectes à Poulainville, dans les Hauts-de-France. Antoine Hubert, l’un des cofondateurs, nous explique comment il compte imposer ses matières premières (huile et farines) dans l’alimentation animale.
Avec l’accroissement de la population mondiale, les besoins nutritionnels de la planète augmentent. Pour les satisfaire, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) recommande l’introduction d’insectes dans les menus. Nutritifs et peu nocifs pour l’environnement, ils représenteraient une des solutions possibles pour résoudre le problème de la faim dans le monde. D’ailleurs, les insectes remplissent déjà les assiettes de nombreux pays et nourrissent deux milliards de personnes, selon la FAO.
Les croquettes de votre chien en contiendront peut-être bientôt. Dans son site de production de Dôle, dans le Jura, Ÿnsect élève des millions de vers de farine, la larve du scarabée Molitor, pour les transformer en poudre ou en huile destinées à l’alimentation des animaux d’élevage et domestiques mais aussi, aux engrais végétaux.
Un marché tellement énorme (700 millions de dollars) qu’à peine huit ans après son lancement, l’entreprise s’apprête à construire la plus grande unité de production d’insectes, à Poulainville, dans les Hauts-de-France. Baptisée Ÿnfarm, cette ferme high-tech a fait l’objet de 25 dépôts de brevets et fournira à terme 20.000 tonnes de protéines par an. (...)
Ÿnsect a choisi de se spécialiser sur la production du Molitor, un scarabée dont la larve est le ver de farine, bien connu des scientifiques. Ce ver contient naturellement 72 % de protéines, un niveau équivalent à celui des meilleures farines de poisson et qui correspond aux besoins intrinsèques des principaux animaux d’élevage : saumons, crevettes, poulets, porcs... Il apporte aussi des bénéfices santé majeurs permettant de réduire l’usage des antibiotiques dans les élevages. On a ainsi réduit d’un tiers la mortalité dans les fermes à truites et crevettes notamment. (...)
Très vite, Ÿnsect a cherché à valoriser les coproduits de l’élevage de Molitor, en particulier les déjections des insectes appelées frass. Il est apparu que ce produit avait des propriétés très intéressantes pour la nutrition des plantes. (...)
Ÿnsect part d’une évidence : dans la nature, tous les animaux mangent des insectes, c’est la base de leur régime alimentaire. Les plantes grandissent sur du compost naturellement produit par les insectes, les vers de terre, etc. Pourtant, aujourd’hui, aucun poisson que vous mangez n’a, lui-même, mangé dans sa vie des insectes, aucun grain n’aura poussé sur un engrais issu d’insectes. Savez-vous comment sont nourris les animaux d’élevage aujourd’hui ? Essentiellement avec du soja — souvent génétiquement modifié —, des céréales, des farines de volailles ou de poisson dont les stocks s’amenuisent. L’élevage d’insectes émet aussi peu d’émissions de gaz à effet de serre et a une très faible empreinte au sol par rapport à toute autre protéine végétale ou animale. (...)
Notre unité de Dôle comporte ainsi plus de 3 niveaux de confinement avec plusieurs systèmes d’alarmes. Elle est équipée de technologies très sophistiquées qui assurent la biosécurité. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec la préfecture et en associant les associations environnementales locales.
À terme, l’Homme mangera-t-il aussi des dérivés d’insectes ? (...)