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Automutilation, "violation flagrante des droits", expulsion coûteuse... Les transferts de migrants vers l’Albanie sous le feu des critiques
#Italie #migrants #immigration #Albanie
Article mis en ligne le 22 avril 2025
dernière modification le 21 avril 2025

Dix jours après le transfert de 40 migrants d’Italie vers l’Albanie en vue d’une expulsion vers leur pays d’origine, deux personnes ont dû être rapatriées en Italie pour des cas d’automutilation et deux autres pour des questions juridiques. Dans la structure de Gjadër, les exilés sont confrontés à une "violation fragrante de leurs droits", estiment des parlementaires qui ont visité les lieux. Les autorités italiennes, de leur côté, vantent le "premier rapatriement d’un citoyen étranger" détenu en Albanie.

Les revers s’enchaînent pour le gouvernement italien dirigé par la Première ministre d’extrême droite Giorgia Meloni. Dix jours après le transfert en Albanie de 40 migrants, quatre d’entre eux sont déjà de retour en Italie, indique la presse locale.

Le 11 avril, 40 exilés maintenus en centre de rétention italien ont été expulsés vers le centre albanais de Gjadër, dans le cadre d’un accord entre Rome et Tirana. Ils sont désormais enfermés dans la structure en attendant leur renvoi dans leur pays d’origine. Une procédure qui peut prendre des mois.

Très peu d’informations ont filtré sur la nationalité et le profil de ces personnes. Selon Rome, plusieurs d’entre elles ont des casiers judiciaires pour des faits de violences, de tentative de meurtre ou de trafic de drogue.
Inaptes à la détention

Mais ce transfert, largement salué par le gouvernement, semble déjà avoir du plomb dans l’aile. Quelques jours après leur arrivée en Albanie, deux migrants ont été rapatriés vers l’Italie pour des cas d’automutilation. Du fait de leur état psychologique, ils ont été jugés inaptes à ce type de détention.

Deux autres ont été renvoyés sur le sol italien pour des questions juridiques : l’un car son appel sur sa demande d’asile n’a pas encore été traitée par la justice italienne, l’autre parce qu’il a déposé une demande de protection internationale à son arrivée en Albanie.

En effet, l’accord entre les deux pays stipulent que seuls les migrants jamais entrés en Italie et les personnes en situation irrégulière présente sur le territoire national peuvent être transférés en Albanie. En demandant l’asile, même une fois arrivé sur le sol albanais, cette personne n’entre dans aucune de ces deux catégories, et ne peut donc être retenue à Gjadër.

Première expulsion controversée vers le Bangladesh (...)

"Comment peut-on qualifier, sinon de farce, le fait de déplacer un migrant déjà détenu dans un CPR [centre de rétention, ndlr] en Italie vers l’Albanie et de le rapatrier, alors qu’il aurait pu être rapatrié directement d’Italie, plus tôt et sans frais supplémentaires pour la communauté ?", s’est interrogé sur les réseaux sociaux le vice-président du parti libéral Italia Viva, Davide Faraone. "Les CPR en Italie ne sont pas pleins (...) Il n’existe aucune situation de surpopulation justifiant l’utilisation de centres albanais inutiles et les mouvements de navires militaires le long de la Méditerranée", a insisté le responsable politique.
"Opacité et manque d’accès à l’information"

Dès les premiers jours, les transferts vers l’Albanie ont suscité de vives critiques. Lors d’une visite dans la structure de Gjadër mi-avril, la députée italienne Rachele Scarpa, du Parti démocrate (centre gauche), et l’eurodéputée Cecilia Strada (Alliance progressiste des socialistes et démocrates) ont pu rencontrer quatre des quarante migrants retenus.

Selon ces femmes politiques, toutes les personnes "ont appris dès leur arrivée qu’elles seraient transférées en Albanie. Aucune information préalable n’a été donnée, en violation flagrante de leurs droits". L’un des exilés a raconté avoir été réveillé à 3h du matin dans le centre de rétention italien où il se trouvait, et qu’il avait découvert qu’il était en Albanie qu’après l’atterrissage. Il n’avait pas eu accès à un avocat. (...)

Les parlementaires dénoncent aussi le manque de transparence du gouvernement. "L’ensemble de l’opération en Albanie est mené dans l’opacité et dans un manque d’accès à l’information pourtant cruciale pour l’exercice adéquat de nos pouvoirs d’inspection en tant que parlementaires."

Avec le transfert de 40 exilés début avril, le gouvernement italien tente de "remettre en activité" les centres d’accueil pour demandeurs d’asile que Rome a construit à grands frais en Albanie. Fin mars, le Conseil des ministres avait adopté un décret-loi permettant de recycler les structures en centres de rapatriement pour migrants en situation irrégulière.

Un projet de reconversion qui témoigne de l’inutilité de ces centres alors que la justice italienne a refusé à plusieurs reprises de valider la détention en Albanie de migrants interceptés en mer, exigeant même leur rapatriement sur le territoire italien. (...)